LE ROLE DES PESTICIDES DANS LA SURMORTALITE DES ABEILLES

 
   
  INTERDICTION OU AMM: LA PLACE DE L'EXPERTISE SCIENTIFIQUE
 
 


Introduction


Une controverse marquée dans le temps

Chronologie générale

Chroniques judiciaires des affaires Gaucho & Régent



Evaluation publique et Comité d'expertise

Agences d'expertise publique

Les comités d'expertise: une réponse aux alertes des apiculteurs



Vers une expertise appropriée à la biologie de l'abeille ?

Effets sublétaux et toxicité chronique

Nouveau test de l'INRA sur les larves

Agences d'expertise publique (AFSSA...) :        

I. Mécanisme pour obtenir les AAM pour les produits phytosanitaires. 

La création de la DIVE rattachée à l'AFSSA

Créée le 22 août 2006, la Direction du végétal et de l'environnement est chargée d'assurer les actions d'évaluation des risques, pour l'homme, l'animal et l'environnement, et des bénéfices en matière de produits phytopharmaceutiques, de leurs adjuvants, de matières fertilisantes et supports de culture. Sa directrice est Pascale Robineau.

 

La procédure d'Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) pour les produits pharmaceutiques

La procédure d'Autorisation de Mise sur le Marché

La mise sur le marché est subordonnée à une autorisation officielle assortie de conditions d'utilisation conformes aux principes des bonnes pratiques agricoles. La procédure d'autorisation consiste à vérifier que ces produits soient composés de substances autorisées pour l'usage et que, dans les conditions normales d'utilisation, ils soient efficaces et n'exercent aucun effet inacceptable sur l'environnement, la santé humaine ou animale. Cette procédure inclut également des exigences concernant leur emballage et leur étiquetage.

 

 Une seule autorité de tutelle : la DGAL

En France, l'autorisation de mise sur le marché des produits relève de la compétence de la Direction générale de l'alimentation (DGAL) du Ministère chargé de l'agriculture qui s'appuie sur les avis rendus par l'AFSSA. La procédure d’évaluation des produits phytopharmaceutiques par l’AFSSA est consignée dans le décret n° 2006-1177 du 22 septembre 2006 (JO du 23 septembre 2006). Depuis septembre 2006, l'Agence, via sa Direction du végétal et de l'environnement, est ainsi en charge de l'évaluation des dossiers d'AMM. Ceux-ci comprennent trois volets complémentaires :

 

Le dossier scientifique

 L'AMM repose sur l'évaluation d'un dossier scientifique normalisé en conformité avec les exigences de la Directive 91/414/CEE (entrée en vigueur le 25 juillet 1993) obtenu avec des méthodes d'expérimentation et de contrôle standardisées : les fabricants de produits déposent auprès de l'AFSSA une demande d'autorisation de mise sur le marché. Cette demande est accompagnée obligatoirement d'un dossier toxicologique et d'un dossier biologique complets.

 
Le dossier toxicologique

 Il renseigne sur les caractéristiques du produit : toxicité des produits phytopharmaceutiques à usage agricole et des produits assimilés, la toxicité du produit pour l'homme et l'environnement (faune, flore, milieux).

 

             Le dossier biologique

 Il renseigne sur l'efficacité, l'apparition de résistance, la sélectivité du produit à l'égard des végétaux.

II. Avis de l'AFSSA sur le thiaméthoxam

Cliquez sur l'image pour afficher l'animation sur l'avis de l'AFSSA

AFSSA

Cliquez ici pour visualiser l'avis complet de l'AFSSA sur le thiaméthoxam



III. L'AFSSA, organisme français d'expertise, relançant la controverse

 
Le rapport de l’AFSSA : "Enquête prospective multifactorielle : influence des agents microbiens et parasitaires, et des résidus de pesticides sur le devenir de colonies d’abeilles domestiques en conditions naturelles, 2008" a relancé la controverse quant à la surmortalité des abeilles en France. En effet, selon l’AFFSA,  « les principales conclusions mettent en évidence l’absence d’effondrements de la population des colonies tels que décrits par les apiculteurs lors de l’exploitation de certaines miellées au cours de notre étude. Il n'y a pas de disparition soudaine et importante des abeilles. Les mortalités hivernales ou les mortalités durant la saison apicole sont non exceptionnelles ».

Tandis que les producteurs de pesticides et les maïsiculteurs soutiennent cette constatation, le monde apicole est divisé.

En effet, selon Joël Schiro, président du SPMF , syndicat des producteurs de miel français (composé d’apiculteurs professionnels) «  les mortalités 2007/2008 dépasseront en ampleur tout ce que nous avons connu par le passé » « Des mortalités d’abeilles 2007/2008 catastrophiques », selon le président du SPMF. » En cela, Joël Schiro contredit le rapport de l’AFSSA.

A l’opposé, Henri Clément, président de l’UNAF, Union nationale de l’apiculture française assure que la situation apicole s’arrange, se rapprochant ainsi des conclusion du rapport de l’AFSSA quant à la surmortalité des abeilles. « Des mortalités d’abeilles hivernales « relativement importantes », selon le président de l’UNAF Henri Clément » 

  

 L’enquête multifactorielle de l’AFSSA rendue publique en 2008 a attisé la controverse sur les causes de la surmortalité des abeilles en revenant sur les résultats d’une de ses propres études menées par Jean-Paul Faucon, chef de l’unité pathologique de l’abeille de l’AFSSA en 2005.Selon l’AFSSA : « La présence des résidus d’imidaclopride dans les matrices apicoles n’a pas entraîné de mortalité aiguë de colonies ou d’abeilles comme cela avait été démontré en 2005 lors d’une expérience de nourrissement de colonies d’abeilles avec du sirop contaminé (Faucon, 2005) »

Les apiculteurs ont réagi à l’enquête en assurant ne pas sous-estimer la varroase mais être sensibles aux sources mêmes de la surmortalité. Selon eux, il semble que l’AFSSA ait confondu les causes et conséquences. La varroase n’est pas une cause mais la conséquence de la baisse des défenses immunitaires des abeilles affaiblies par les pesticides systémiques.

 

La problématique de l’AMM n’est pas seulement cruciale au regard de l’autorisation des pesticides, mais aussi au regard de l’homologation des médicaments pouvant traités les pathogènes des abeilles. Or, une étude encore non publiée de l’AFSSA révèle qu’elle aurait retrouvé des produits interdits dans la cire des ruches. Les traitements des maladies seraient menés avec des procédés « maison » (comme des lanières imbibées d’amitraze) et certains traitements seraient effectués avec des produits ne disposant pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM), comme le coumaphos (un organophosphoré neurotoxique retrouvé jusqu’à hauteur de 4,08 mg/kg dans les cires) ou le fluvalinate (un neurotoxique de la société Makteshim). Or, à lui seul, le coumaphos pourrait être responsable d’une toxicité chronique, estime l’AFSSA. « Différentes raisons expliquent la réticence des apiculteurs à utiliser des traitements ayant une AMM, parmi lesquelles le coût et l’efficacité », a affirmé Michel Aubert. Il est vrai que parmi les trois médicaments qui disposent d’une AMM en France, l’Apistan (à base de tau-fluvalinate) induit l’apparition de résistances, l’Apiguard (à base de thymol), a une efficacité moyenne, et l’Apivar (à base d’amitraze) donne parfois de mauvais résultats.

L’AFSSA a affirmé « alors que les pesticides font l’objet d’une suspicion croissante, ils sont absents des ruchers de toutes origines qui ont subi des mortalités importantes et que nous avons analysés dans cette enquête ». Jean-Paul Faucon a assuré « la situation sanitaire des ruchers français est restée aussi préoccupante. L’impact de la varroase est toujours fort, et peut-être même s’est-il accru en raison des signes de désintérêt des apiculteurs pour la pathologie classique et sa prévention ». « Ces résultats sont comparables à ceux que nous avions obtenus lorsque nous avions recherché l’origine de la mort de quarante et un ruchers survenue lors des hivers 1998-1999 et 1999-2000 en France, et que nous avions mis en évidence le rôle dominant de la varroase, associé à l’utilisation de traitements acaricides insuffisamment efficaces, et celui de Nosema » .

L’apiculture française serait donc en train de payer l’entêtement de ses apiculteurs, qui, obnubilés par les pesticides en auraient oublié d’être les agents de la sécurité sanitaire des abeilles. C’est ce qu’affirme l’AFSSA et ce que relaie largement l’apiculteur Joël Schiro, ce qui en fait un dissident vis à vis du reste du monde apicole. 

En effet, le reste du monde apicole est en conflit ouvert avec l’AFSSA. Leur opposition s’est notamment traduite par le refus de la Coordination apicole de participer à l’enquête de l’AFSSA menée dans cinq départements (Eure, Gard, Gers, Indre et Yonne). Selon Yves Miserei, journaliste scientifique du Figaro qui s’est particulièrement attaché à relayer cette question, la coordination apicole estimait que l’expérimentation était inutile ; la nécessité était d’interdire rapidement les substances testées (imidaclopride et Fipronil). Jean-Paul Faucon se serait fait « entarter » par des apiculteurs, l'accusant de complicité avec les industriels (Bayer et BASF).

 

Nous avons donc conclu que les études de l’AFSSA, moteur de l’expertise française, ne sont pas de nature à clore la controverse mais bien à la relancer voire la attiser, particulièrement quant à la possible surmortalité des abeilles domestiques et au rôle des pathogènes dans les mortalités. L’AFSSA a ainsi contribué à faire passer la controverse centrée sur les pratiques agricoles à une controverse qui mettrait en cause les dénonciations et pratiques apicoles. Les mauvaises pratiques apicoles désignées par l’AFSSA ont été régulièrement relayées par le SPMF (Syndicat des producteurs de miel français) qui a mis en exergue le manque de formation de certains apiculteurs.

 
 
« Si les abeilles venaient à disparaître, l'humanité n'aurait plus que quatre années devant elle. »
Albert Einstein