Certaines frontières sont brouillées au sein de la controverse street art. En effet, tous les acteurs sont constitués public consciemment ou non. Les publics ne sont pas tous parties prenantes mais ils sont forcément spectateurs en tant que passants. Ils n’ont pas besoin de s’engager car l’art implique un jugement esthétique, et donc subjectif. Chacun peut se forger son opinion sur le street art. Est-ce qu’il aime ou non tel ou tel graffiti ? Le trouve t-il légitime dans l’espace public ? Un propriétaire dont les murs viennent d’être dégradés par un tag ou graffiti verrait certainement d’un mauvais œil cette pratique alors que dans un musée, il apprécierait peut-être l’œuvre.

Donner un panorama représentatif de l’opinion publique est donc une tâche très périlleuse tant il existe d’avis et d’opinion divergentes au sein de la population. Un moyen s’offrait à nous pour appréhender l’opinion des plus jeunes: lire les blogs, tandis que l’avis des détracteurs du street art est perceptible dans certains reportages vidéo. Nous avons pu interroger une gérante de boutique du 13ème arrondissement.

Que pensez-vous des tags et graffitis ?

Je suis contre les graffitis sur les murs des particuliers. J’habite la butte aux Cailles. L’entretien du mur, c’est pas eux qui le font. Il faut respecter les biens privés. Pourquoi pas faire des panneaux dans la rue avec leurs dessins ?

Des graffitis on en a tous sur les murs ! En plus les produits sont indélébiles, merci ! J’ai une boutique qui donne sur deux façades. Je fais nettoyer les murs, les graffitis sont à peine atténués. Il faudrait refaire une façade. Je loue en plus.

 Êtes-vous sensible au street art qui entre dans les musées ?

 Oui tout à fait, ce qui me dérange c’est le non respect de la propriété privée.

 Certains propriétaires de boutiques font peindre volontairement leur rideau de protection …

Oui, c’est fait sur commande, ils choisissent leurs motifs en pensant que ça s’arrêtera, mais non. On retrouve des graffitis sur ces dessins.  Ces personnes ne se respectent même pas puisqu’ils recouvrent leurs graffitis l’un après l’autre.

 Connaissez-vous MissTic ?

Un de ses graffitis s’est fait recouvrir par un autre. Elle est reconnue, elle a fait une affiche de cinéma,… elle a raison de diffuser, de trouver d’autres supports mais ça énerve quand elle le fait sur des murs privés. Même si elle est reconnue, ce sont des murs privés. Je ne fais pas de distinction entre les graffitis.

 Pourtant, elle demande l’autorisation avant de peindre…

 Aujourd’hui peut-être, mais jusque là non.

 

Ainsi, si certains  voient dans le street art un nouveau mode d’expression propre à une jeunesse en mal de repères, d’autres n’y voient que du vandalisme. D’autres y voient encore une manœuvre de récupération politique animée par des pouvoirs publics en mal de popularité auprès des jeunes.

Ainsi, les commentaires accessibles sur les blogs reflètent cette diversité de points de vue. Certains affirment que le ministère de la Culture « fait sa comm’ » grâce à une politique de plus en plus laxiste face au street art. Ils pointent également du doigt la répression simultanée menée par la police contre les tagueurs, ce qui illustrerait une hypocrisie politique absolue.

D’autres déplorent le « tag vandale » qui importune les riverains, qui nuit à la tranquillité des petites gens, et qui n’a souvent rien d’artistique.

D’autres citoyens dénoncent le tag comme une dépense qui alourdit les impôts. En effet, ces personnes affirment que le dégraffitage est à leur charge.

Enfin, quelques internautes protègent les graffeurs en rappelant que leur art exige qu’ils exercent dans les rues, et qu’ils sont les représentants d’une nouvelle tendance.

Une certitude : le street art ne laisse pas indifférent.