CNIL

  • Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés
  • Institution d'Etat

Description

La CNIL est composée de dix-sept commissaires venant d’horizons divers. Son président est élu parmi ses membres. Elle est chargée de veiller au respect de l'identité humaine, de la vie privée et des libertés individuelles ou publiques dans un monde numérique (face aux dangers que peut représenter l’informatique, notamment avec la multiplication des fichiers contenant des données individuelles). Garante de la protection des données à caractère personnel et de la vie privée, la CNIL a ainsi pour mission de veiller à la bonne application de la loi dans tous les domaines où des données à caractère personnel sont susceptibles d’être utilisées. Le champ des recherches sur les statistiques ethniques n’échappe donc pas à la compétence de la CNIL. Ainsi, le Président de la CNIL a constitué, en 2005 un groupe de travail, présidé par Madame Anne Debet, professeur des universités et membre de la CNIL et à rendu un premier avis sur cette question en juillet 2005. Un nouveau groupe de travail a été constitué fin 2006 et a donnée lieu, le 16 mai 2007, à la publication d'un rapport.

La décision de création d’une nomenclature nationale de catégories ethniques [...] appartiendrait au Législateur sous le contrôle du Conseil Constitutionnel.- CNIL

Positionnement

La Commission s’est prononcée contre la production dans l’immédiat de statistiques construites à partir d’une nomenclature de catégories ethno-raciales. Elle présente pourtant dix recommandations visant à améliorer la mesure de la diversité " tout en protégeant les données personnelles ". La CNIL soutient un accès plus large aux données existantes et le développement des enquêtes par questionnaire dès lors qu'elles se font sur la base de l'anonymat et du volontariat. En revanche, la CNIL est opposée à la construction d'un référentiel " ethno-racial ". Par exemple, elle considère les données sur l’ascendance des personnes (nationalité et lieu de naissance de leurs parents), inutiles pour la gestion des ressources humaines. D'une manière générale, la CNIL recommande que les mesures de la diversité, que souhaiterait mener un organisme, fassent l'objet d'une " expertise extérieure indépendante ", à travers un organe de recherche qui s'assurerait par exemple de la confidentialité du traitement des données, de leur anonymat et de leur effacement après usage. Ainsi, les critères ethno-raciaux s'ils sont écartés des grandes statistiques publiques, peuvent être utilisés par les chercheurs, sous contrôle, dans des enquêtes ciblées.

HALDE

  • Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'Egalité
  • Institution publique

Description

La HALDE est une autorité administrative indépendante dont l’existence est récente puisqu’elle a été créée par la loi 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant sur la création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. Elle est compétente pour connaître toutes les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi ou par un engagement international pour lequel la France s'est engagée. Jusqu'à mars 2010, Louis Schweitzer en était le président. Nommée par le président de la République, Jeannette Bougrab a pris ses fonctions en avril. L’article 15 de la loi de 2004 indique aussi que la Haute autorité " conduit et coordonne des travaux d'études et de recherches relevant de sa compétence ". La parole de cette autorité est donc légitime dans le débat sur la mesure des discriminations et de la diversité. A cause de l'imbrication des sujets dans le discours médiatique entre statistiques ethniques et discrimination, action volontaire et discrimination positive, la HALDE est un acteur important de la controverse. Elle a vu ses compétences élargies par la recommandation du COMEDD d'instaurer un observatoire de la discrimination à son sein.

Le refus d’un référentiel ethno-racial [n'exclue] pas la possibilité d’enquêtes incluant des questions subjectives.- HALDE

Positionnement

La HALDE ne communique pas sur son site web en tant qu'organisation sur le sujet des statistiques ethniques. Elle s'exprime à travers son porte-parole, Louis Schweitzer, dans les médias. En 2006, la HALDE s’oppose au recueil de données relatives à l’origine " raciale ou ethnique " par les employeurs dans le secteur privé. Elle considère qu’il n’est pas nécessaire de compter la diversité en France pour pouvoir efficacement lutter contre différentes formes de discriminations liées à l’origine. Lors du vote de la loi Hortefeux en 2007, la HALDE s’est auto saisie de l’amendement CNIL. En 2007, elle approuve globalement la disposition mais revendique pourtant certaines garanties. Elle insiste pour que les enquêtes prévues par l’amendement n'engendrent pas la création de catégories « ethno-raciales » et surtout n'aboutissent pas à des fichiers documentant les origines des personnes. Néanmoins le président de la HALDE, à l’époque Louis Schweitzer, rappelle publiquement à plusieurs reprises la nécessité de prendre en compte les exceptions prévues par la loi Informatique et libertés. Selon lui, la possibilité d'inclure des questions subjectives telle que : " Vous sentez-vous perçu comme noir ? " n’entrave pas le refus catégorique d’un référentiel ethno-racial sous condition du consentement des intéressés et de solides garanties.

HCI

Institution d'Etat

Description

Le Haut Conseil à l’intégration, fondé en 1989, est une institution qui réfléchit et émet des propositions à la demande du Premier ministre sur l’ensemble des questions concernant " l’intégration des résidents étrangers ou d’origine étrangère ". Présidé par la philosophe Blandine Kriegel d’octobre 2002 à novembre 2008, le HCI est aujourd’hui présidé par Patrick Gaubert également président de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA) depuis 1999.

Le HCI soutient une vision de diversité et d’ethnicisation de la société française ces dernières décennies. Pour cette institution la prise en compte de ce phénomène est importante pour l’analyse de certains contextes comme l’intégration, l’emploi, le logement, etc. Le HCI rappelle que la diversité culturelle s’est développée en France, non par la coexistence de communautés séparées, mais par la volonté d’un « vivre ensemble » qui confère à l’individu un rôle primordial. Ainsi pour lui la définition de catégories ethniques irait contre l’idéologie républicaine française. Son objectif est de trouver un moyen de mieux comprendre les problématiques dans lesquelles la diversité des individus intervient tout en préservant l’intégrité du modèle républicain français.

Favorable à la mesure de la diversité en fonction du patronyme et du lieu de naissance- HCI

Positionnement

En mars 2009, Patrick Gaubert rappelle la position du HCI, déjà adoptée par Blandine Kriegel, à savoir que le Haut Conseil à l’Intégration est «opposé à toute mesure à caractère ethnique de la population». Cette position est explicitée dans un rapport intitulé « LES INDICATEURS DE L'INTEGRATION statistiques ethniques, enquêtes sur les patronymes, mesure de la diversité, baromètre de l'intégration » du 9 janvier 2007. Pour le HCI la construction de catégories ethniques soulève deux questions : tout d'abord celle de l'objectif de la connaissance des origines des immigrés et de leurs descendants (interprétations culturalistes, mesure de la ségrégation territoriale, etc.); puis celle de l'utilité pour les politiques publiques quant à leur évaluation et quant à d'éventuelles propositions de réforme. Le conseil voit l’intégration comme un " parcours individuel dans un processus collectif. L’intégration est un processus à long terme, dont seules des études portant sur l’évolution des générations peuvent rendre compte ". Il propose alors une solution alternative aux statistiques ethniques, conforme aux indicateurs fournis par l’INSEE et l’INED. Elle utiliserait le patronyme et le lieu de naissance comme base d'analyse. Cependant pour le HCI on ne peut réduire l'intégration à un indicateur tant ce phénomène est complexe. Mais l'usage de plusieurs facteurs tels que les données fournies par le recensement de la population, des questions sur le cadre de vie (scolarité, emploi...), sur le comportement civique ou encore sur la vie culturelle pourraient aider a suivre et comprendre les processus d'intégration.

On observe un revirement de situation quant à la position du HCI au sujet de la prise en compte du sentiment d’appartenance. Ce dernier fut préconisé dans le rapport de 2007 et se retrouve aujourd’hui rejeté par Patrick Gaubert. " On ne peut pas demander aux gens: de quelle communauté vous faites partie... " dit-il. " Mon combat est sincère et républicain, insiste le patron du HCI. Des statistiques du fait de la race et de la religion vont à l'encontre de toutes les valeurs de notre République ".

Louis Scwheitzer

Président de la HALDE jusqu'en mars 2010

Description

Haut fonctionnaire et homme d'affaires français, Louis Schweitzer fut notamment président de Renault et occupe ce poste chez Volvo aujourd'hui. Par ailleurs, il est membre des conseils d'administration de Veolia, BNP Paribas ainsi que L'Oréal et il préside également la branche internationale du MEDEF et le conseil de surveillance du groupe Le Monde.

En tant que président de la HALDE pendant la plus grande partie de notre période d'étude, Louis Schweitzer demeure le principal porte-parole de cette organisation, laquelle ne s'exprimait pas de manière ouverte par ailleurs. C'est pourquoi, bien qu'il n'ait pas de pouvoir de décision en ce qui concerne l'introduction des statistiques ethniques, Louis Schweitzer est assez fortement impliqué dans la controverse. Il est un des acteurs le plus présent dans les médias, tant nationaux que régionaux, et donne de nombreuses interviews.

Je refuse tout classement des gens en pseudo-catégories ethnoraciales, tout système les identifiant par leur appartenance ethnique et raciale.- Louis Schweitzer

Positionnement

Dans un entretien avec Le Monde en avril 2009 Louis Schweitzer précise qu'il ne faut pas définir les gens par rapport à une communauté mais prône le développement de l'" action positive en France en la basant sur des critères sociaux ", sans que " cela n'implique de classer chaque personne dans une catégorie ethno-raciale ".

Il refuse l'existence des " pseudo-catégories ethno-raciales " et toute tentative d'identification par appartenance ethnique et raciale, car comme il le précise dans Les Echos en mars 2009, « en mettant les gens dans des boîtes, on risque de transformer la France en mosaïque communautaire ». Selon lui, les statistiques ethniques auraient donc un effet performatif sur la société. Pourtant, il n'exclue pas a priori toute mesure de la discrimination, soulignant l'intérêt d'études sur " la perception de l'appartenance ethnique " pourvu qu'elles se fondent sur l'anonymat, le volontariat et l'autodéclaration, (Le Monde en mars 2009). En tant que président de la HALDE, pour lutter contre les discriminations, il prône comme outil le test de discrimination, qui permettrait de comparer les chances de succès de deux candidats ayant des compétences ou des ressources similaires et d'origines différentes.

La HALDE a bénéficié du rapport COMEDD, car il recommandait une fortification de son pouvoir à travers la création d'un observatoire des discriminations en son sein. La réaction de Louis Schweitzer au rapport COMEDD était donc positive: " C'est un travail remarquable. J'avais deux préoccupations majeures : qu'il n'y ait pas de fichiers de gestion nominatifs et pas de catégorisation ethno-raciale. Ces deux éléments ont été écartés, je suis donc rassuré. Enfin, le fait de confier à la HALDE une mission de supervision des enquêtes qui pourraient être faites dans les entreprises me paraît une bonne chose. [...] Cela dit, ce rapport ne peut pas régler le problème des discriminations en soi, car on peut très bien mesurer sans agir. Et on peut agir sans mesurer. " (" Il faudrait pouvoir faire des visites inopinées dans les entreprises " 9 Février 2010, Les Echos)