Il apparaît que le problème de métissage soulève de nombreuses interrogations. Cependant la pratique de la statistiques sait gérer ce genre de situations. L'établissement de catégories "floues" peut être aisément menée à l'aide d'une approche à plusieurs variables très connue du monde scientifique. Ici sont présentées les deux méthodes statistiques répondant à ces fins.
L'indicateur gradué
La combinaison graduée, très répandue dans le monde de la recherche, se borne à combiner deux ou trois variables en privilégiant les cas de figure les plus répandus. Sous sa forme la plus simple, la variable de mixité est une dichotomie enrichie d’une catégorie mixte. Par exemple, le répondant a deux parents nés à l’étranger, un seul ou aucun. Les trois cas de figure sont exclusifs. Cette solution aboutit souvent à montrer que les personnes d’origine mixte occupent une situation intermédiaire sur toutes sortes d’indicateurs sociaux, y compris par la fréquence des discriminations vécues. La statistique publique utilise régulièrement la combinaison graduée.
On notera que l'enquête commandée par le CRAN à TNS-Sofres en 2007, en se fondant sur des déclarations d'appartenance, reprend la typologie majorité blanche, minorité noire et métis. L'enquête a permis de montrer que les métis occupaient systématiquement une position intermédiaire pour tous les indicateurs sociaux (instruction, emploi, revenus, origine dans les DOM, acquisition de la nationalité francaise) et les indicateurs de discrimination (fréquence des discriminations vécues). La combinaison graduée s'élargit à la mixité de toute origine que l'on voudra étudier de près.
L'analyse multivariée
Cette technique requiert de décomposer la multiplicité des origines en autant de variables séparées dont on testera la sensibilité aux situations de discrimination aux côtés d’autres facteurs explicatifs. Après quoi les variables d’origine sont intégrées une à une dans un modèle d’analyse multivariée qui s’efforcera de mesurer séparément le poids de chacune sur les différences de situation ou de comportement.
L’exemple le plus courant de cette technique est la régression logistique, intégrée dans des logiciels d’usage courant. Il devient possible ainsi de faire la part des choses : l’accès des descendants d’immigrés à l’emploi varie-t-il selon que les deux parents comptent deux immigrés,un seul ou aucun ? Varie-t-il en fonction de l’origine nationale ou géographique de chacun des parents ? Selon que toute la fratrie est née en France ou une partie?
On évoque souvent des cas extrêmes de brassage des origines (tel le « Breton d’origine arabe né à Paris d’une mère germano-portugaise ») pour mettre au défi la statistique d’appréhender l’inépuisable richesse des histoires individuelles. Mais la statistique n’a jamais cherché à mesurer avec exhaustivité ces hybrides. Elle travaille sur les grands nombres en s’astreignant à produire des résultats représentatifs et significatifs. L’étude des destinées individuelles est sans fin. Une enquête bien conçue permet d'étudier des milliers de vie en quelques années. Cela est certes réducteur,mais c’est justifié si cela fait progresser la connaissance qu’une société peut avoir sur elle-même.
L’intérêt d’une telle analyse est de faire la part des diverses composantes de l’origine, par exemple maternelle et paternelle, qui peuvent agir dans des sens opposés ou convergents.