Politique d'éducation des États

Les pouvoirs publics accueillent les classements de différentes manières : ils peuvent dicter des mesures aux universités publiques, ou bien élaborer et mettre en œuvre des politiques d’éducation visant à faire remonter les universités publiques dans les classements, ou bien tout simplement ignorer ces rankings.

En somme, nous dirons qu’il existe pour les pouvoirs publics quatre manières de considérer ces classements :

1. Prendre les classements au premier degré : l’objectif étant de tout mettre en œuvre pour « remonter » dans le classement. Néanmoins, cela peut également se traduire par un usage politique des classements : utiliser les chiffres pour justifier des réformes.

L’exemple des PRES, les pôles de recherche et d’enseignement supérieur, en France. En 2003, la première publication du classement de l'université Jiao Tong de Shanghaï avait fait l'effet d'un électrochoc. Les pouvoirs publics ont vécu comme une véritable camouflet le fait de ne pas figurer en bonne place dans le classement. Après avoir cherché les causes de cette situation, on s’est rendu compte que le problème venait de la "balkanisation" du système d'enseignement supérieur français, avec la coupure entre les grandes écoles qui captent les élites, et les universités de masse ; ainsi que celle de la recherche, scindée entre universités et organismes de recherche. Tout cela faisait perdre des points. Les PRES permettent aux universités, grandes écoles et organismes de recherche de se rapprocher pour partager des écoles doctorales, des laboratoires, voire des formations de master. Une loi de 2006 préconise que des enseignements puissent se regrouper et créer une structure au-dessus des universités, dénommée un PRES. Cela donne de la visibilité, sur un site géographique, à un regroupement d’établissements publics. Derrière le regroupement émerge surtout l’idée d'exister dans les classements internationaux : « Fusionner Paris VI et Paris XI et on sera dans le top 30 des classements. »

L’exemple de la Malaisie. L’université de Malaisie a chuté de la 89e place en 2004, à la 192e place en 2006. Dans le dernier classement du THES-QS, l’université ne figure même plus dans le Top 200. Les pouvoirs publics ont décidé de remédier à cette situation en augmentant le nombre d’étudiants internationaux, alors même que les places universitaires sont insuffisantes pour les malaisiens. L’accent, et donc le financement, est mis sur les MBA et les sciences naturelle ou la biomédecine ; tandis que les sciences sociales, qui s’avèrent d'un grand usage dans un pays en développement comme la Malaisie, sont beaucoup moins nanties.

Pour les sinophones, voici les réactions des malaysiens à la publication du dernier classement du THES !

2. Utiliser les classements de manière à provoquer le débat, réfléchir sur les universités nationales, lancer des enquêtes pour voir si tout fonctionne, déterminer ce qu’il faudrait améliorer, ou identifier les universités à financer.

C’est le cas de l’évaluation de la recherche au Royaume-Uni, le RAE - Research Assessment Exercise. En effet, Il existe au Royaume-Uni un double système de soutien au financement de la recherche de l’enseignement supérieur. Le Higher Education Funding Council for England (HEFCE) et le Scottish Higher Education Funding Council en Écosse attribuent des fonds à des établissements d’enseignement supérieur sélectionnés en fonction de critères correspondant à la qualité des travaux de recherche.

La qualité des travaux est déterminée à l’occasion d’un exercice d’évaluation de la recherche, le RAE, réalisé tous les quatre ou cinq ans. Le dernier RAE a eu lieu en 2001 et ses résultats ont dicté les décisions prises en matière de financement à partir de 2002-2003. Une note sur une échelle allant de 1 à 5 est attribuée à chaque établissement en fonction de la qualité de ses travaux derecherches au sein de chacune des unités d’évaluation - département universitaire - dans laquelle il travaille. Seuls les départements ayant obtenu les meilleures notes obtiennent des fonds et la note 5 permet d’obtenir un financement presque trois fois plus élevé que la note 4 pour un volume identique de travaux de recherche. Il en résulte une forte concentration des financements par établissement et par département.

3. Se comparer à l'échelle mondiale.

Les Etats peuvent considérer les classements comme des outils de connaissances permettant de se situer à une échelle mondiale sur la question de la qualité de l’enseignement supérieur. C’est le cas du gouvernement chinois, qui a « commandé » le classement de Shanghai, car il voulait être en mesure d'évaluer la progression des universités chinoises et savoir où elles se situaient par rapport aux universités du monde entier.

4. Ne pas prêter attention aux classements.