MISE EN ŒUVRE
DES PROGRAMMES DE L’ÉCOLE PRIMAIRE
Apprendre à lire
NOR : MENB0600023C
RLR : 514-4
CIRCULAIRE N°2006-003 DU 3-1-2006
MEN
BDC
Texte
adressé aux rectrices et recteurs d’académie ; aux inspectrices et
inspecteurs
d’académie, directrices et directeurs des services départementaux de
l’éducation nationale ; aux directrices et directeurs d’IUFM
À l’école maternelle, l’enfant a commencé
à
s’approprier le patrimoine de la langue française. En parlant et en
découvrant
le monde de l’écrit, il s’est chaque jour nourri de mots nouveaux. Par
l’attention patiente de sa maîtresse ou de son maître, il a compris que
ces mots se composaient de sons. Il
a
commencé aussi à saisir que, par des
lettres que l’on voit et qui se répètent,
on peut
porter sur le papier la trace d’un son que l’on entend. Il a
même commencé
à dire le son en voyant le signe.
Guidé avec méthode, il s’est
approché de la frontière de la lecture.
C’est sur cette lisière d’un savoir nouveau que l’élève arrive au cours
préparatoire où, en quelques mois, il va vraiment apprendre à lire.
Apprendre à lire résulte de la
découverte du principe alphabétique de notre langue. Les
chercheurs, en
France et l’étranger, en sont d’accord
: l’apprentissage
de la lecture passe par le décodage et l’identification des mots
conduisant à
leur compréhension.
L’identification des mots n’a rien à voir avec une devinette
et son
apprentissage se construit progressivement.
Il est nécessaire que l’élève identifie les sons de la langue française
ainsi
que la relation qui les relie aux lettres et groupes de lettres
correspondants.
Il comprendra alors que les lettres
codent du son et non du sens. Il apprendra à assembler
les lettres pour constituer des syllabes prononçables,
puis des mots qu’il rapprochera de ceux dont il a déjà l’image auditive
dans sa
mémoire. La syllabe est un point d’appui essentiel : savoir
segmenter la parole en unités, retrouver les syllabes qui
constituent un énoncé sont des premiers pas vers la prise de conscience
des
sons élémentaires de la langue.
Au cours du CP, à l’oral et à l’écrit, un entraînement
systématique à la relation entre lettres et sons doit donc
être assuré afin
de permettre à l’élève de déchiffrer,
de relier le mot écrit à son image auditive et à sa signification. Pour
cela,
la copie et la dictée de syllabes puis de mots seront des exercices
nécessaires
: la conquête du code doit associer
lecture et écriture.
Il est ensuite indispensable d’automatiser
le plus vite possible l’identification des mots en amenant l’élève à
mémoriser
leur forme écrite et à se constituer un lexique
orthographique mental. Ce précieux trésor de référence se
constituera
progressivement, par la rencontre fréquente des mots en lecture et en
écriture.
L’automatisation de la reconnaissance des mots
nécessite des exercices
systématiques de liaison entre les lettres et les sons et ne saurait
résulter
d’une mise en mémoire de la photographie de la forme des mots qui
caractérise
les approches globales de la lecture : j’attends donc des maîtres
qu’ils
écartent résolument ces méthodes qui saturent la mémoire des élèves
sans leur
donner les moyens d’accéder de façon autonome à la lecture.
Déchiffrer les mots dans l’ordre constitue un savoir-faire
indispensable, mais
ne suffit pas : le but de la lecture est d’accéder au sens précis
des mots, puis
des phrases, puis des textes et non pas seulement au bruit des mots. Il
est
donc indispensable d’amener l’élève à maîtriser la langue de l’écrit,
différente de celle qu’il entend et pratique à l’oral. Il lui faudra
comprendre
l’importance de l’orthographe des mots (orthographe d’usage, premiers
éléments
de l’orthographe grammaticale) ainsi que de l’organisation grammaticale
de la
phrase et des textes qui met en scène le sens.
Il devra passer rapidement d’une lecture mot par mot à la
lecture de phrases
et de textes. Par la familiarisation avec des livres adaptés à son âge,
l’élève
étendra sa culture et donnera plein sens à la lecture par laquelle il
apprendra
à accéder au savoir de manière autonome.
L’apprentissage de la lecture passe donc par des étapes et
suppose de la
méthode, de la rigueur,
mais aussi du temps : ainsi, lire et écrire effectivement
deux à trois heures par jour comme le recommandent les programmes,
apprendre
quotidiennement un ou deux mots nouveaux, seront d’un grand profit.
À la fin du CP, tous les élèves doivent avoir acquis les techniques du
déchiffrage et les automatismes qui permettent la lecture autonome et
le
plaisir de lire. La généralisation de l’évaluation au début du CE1, que
je
viens de décider à la demande de nombreux maîtres, a pour objectif
d’analyser
les difficultés techniques qui persisteraient à ce niveau afin de
mettre
immédiatement en place des programmes personnalisés de réussite
éducative :
tous leurs bénéficiaires doivent être réellement lecteurs à la fin de
l’année
de CE1.
Apprendre la lecture à un enfant est l’affaire des maîtres et des
maîtresses :
je veux leur exprimer ici toute ma confiance. Pour remplir cette
mission
essentielle, ils ont droit à la meilleure formation. Les inspecteurs,
les
conseillers pédagogiques, les formateurs des IUFM, sont donc les
premiers
responsables de la mise en œuvre de ce texte qui sera complété par des
instructions plus détaillées : j’attends qu’ils apportent tout leur
soutien aux
jeunes enseignants, mais aussi à des enseignants plus expérimentés,
pour que
ces orientations se traduisent concrètement dans les classes. La
formation
initiale, comme la formation continue, devront consacrer aux
apprentissages
premiers de la lecture un temps significatif.
Ainsi, l’école se donnera tous les moyens pour que tous les élèves
réussissent
ces premiers pas décisifs dans le monde de la lecture. Pour atteindre
ce but,
les maîtres et les maîtresses méritent les meilleurs outils : je
souhaite que
les éditeurs de matériel pédagogique à destination
des classes, ainsi que les gestionnaires des dispositifs de formation à
distance, contribuent à cet effort de recentrage des apprentissages
premiers de
la lecture.
Les parents doivent faire confiance aux maîtres dans l’exercice de leur
mission
: il faut cependant qu’ils soient informés du projet pédagogique qui
conduira
leur enfant à l’apprentissage de la lecture au cours préparatoire. Je
recommande que tous soient régulièrement tenus au courant de la
progression
suivie et conseillés sur la nature du soutien qu’ils pourraient
utilement
apporter.
J’ai fait de l’égalité des chances la référence constante de mon action
et je
suis persuadé que l’égalité des chances, c’est d’abord l’égalité des
toutes
premières chances. J’attends donc que cette instruction soit mise en
œuvre sans
délai.
L’enjeu est essentiel pour notre pays.
Je sais pouvoir compter sur l’engagement de chacun. Je remercie les
maîtresses
et les maîtres de ce qu’ils font et de ce qu’ils feront pour faire
acquérir à
tous nos élèves ce bagage indispensable qu’est la maîtrise de la
lecture, au
service de notre patrimoine commun le plus précieux : la langue
française.
Le ministre de l’éducation nationale, de
l’enseignement supérieur et de
la
recherche
Gilles de ROBIEN