Notre méthode
La méthode de la cartographie du web est bien précise, c'est pourquoi nous l'explicitons ici
Dès le départ, plusieurs acteurs ont été identifiés comme étant au cœur de la controverse. À noter qu’il ne s’agit d’une controverse ni purement scientifique, politique ou associative. La nature de ces acteurs étant très diversifiée, nous avons cherché à sélectionner des acteurs représentatifs de chaque milieu :
- Industriel : Areva et ses filiales, EDF.
- Politique : gouvernement français, nigérien et gabonais (ces deux derniers sont des pays où l’uranium est extrait par des filiales d’Areva et où la controverse est aussi déjà bien avancée)
- Scientifique : Tous les organismes de régulation ou de recherche, comme l’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN), le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ou l’Institut de Radioprotection et de Sureté Nucléaire (IRSN), mais aussi la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD). Cette association loi 1901 a été crée en réaction contre les informations diffusées en France lors de la catastrophe de Tchernobyl et dénonce la manque d’indépendance et de transparence des experts officiels. Elle est placée dans cette catégorie car elle est publiquement reconnue par les autres acteurs comme étant un expert de référence. Par exemple, considérer que les études de la CRIIRAD comme des sources d’expertise indépendante. Nous avons donc défini comme des sites à explorer : *http://www.asn.fr * http://www.cea.fr * http://www.irsn.fr * http://www.criirad.org
- Associatif : S’il y a un basculement de l’expertise, un changement de paradigme dans cette controverse, c’est justement parce que des associations se sont emparées du sujet pour dénoncer les impacts sanitaires de l’exploration d’uranium. Ces associations sont également très diverses. Il y a des associations simplement contre le nucléaire, comme le Réseau Sortir du Nucléaire, des associations de défense de l’environnement en général, comme Greenpeace ou Amis de la Terre, mais aussi des associations liées aux questions de santé, comme Médecins du Monde, ou encore des associations créées pour défendre les victimes de cette controverse, comme l’Association Serge Venel pour les anciens de la Cominak et Somaïr ou l’association nigérienne Aghir in'man.
À partir de cette liste d’acteurs précédemment mentionnée, nous avons identifié un corpus cohérent de 108 acteurs, avec l’aide du logiciel Navicrawler. Ces ressources ont été analysées et classées, sur Gephi, afin de retrouver des données relationnelles entre eux. Nous avons défini quatre couches de classification qui nous permettront de connaître un peu mieux le territoire et la nature des acteurs de la controverse :
- Langue (français, anglais…)
- Pays représenté (France, Niger, Gabon, communauté internationale ou multi-pays…)
- Milieu (politique, industriel, scientifique et associatif)
- Nature (association anti-nucléaire, environnementale ou consacrée à la santé, expert public ou privé…)
Nous sommes conscients que ces deux dernières catégorisations sont très semblables. Cependant, nous avions besoin du « milieu » pour avoir une vision plus globale de la configuration de la controverse, mais aussi de la dernière pour avoir une vision beaucoup plus fine. C’est cette dernière qui nous permettra de différencier, par exemple, la position des experts financés par le public de celle des experts privés (notamment ceux de nature associative comme la CRIIRAD). C’est aussi la catégorisation par nature qui nous permet de voir les différences parmi chaque communauté, par exemple, si le milieu associatif est plutôt orienté environnement ou santé.
Par ailleurs, partant des différentes sous-controverses, nous avons défini trois autres couches de classification :
- le positionnement des acteurs par rapport à la résolution de la controverse : est-ce qu’il faut plus de recherches scientifiques pour établir le lien causal entre les différentes maladies identifiées et l’extraction d’uranium ou est-ce que, le lien causal étant trop difficile à prouver scientifiquement ou suffisamment prouvé, la résolution ne peut que passer par un procès devant un tribunal ?
- le positionnement des acteurs par rapport au lien causal maladie/extraction d’uranium et à la responsabilité d’Areva : est-ce qu’ils ne reconnaissent pas les maladies comme étant conséquence de l’extraction d’uranium, est-ce qu’ils les reconnaissent comme telles mais sans reconnaître la responsabilité d’Areva ou est-ce qu’ils reconnaissent la maladie et aussi la responsabilité d’Areva publiquement ?
- enfin, en ce qui concerne la dimension géopolitique de l'extraction de l'uranium : est-ce que l’organisation actuelle de l’extraction permet, à la France, comme cela est souvent avancé, de disposer d’une vraie indépendance énergétique ? À noter que cela englobe plusieurs enjeux : l’uranium est extrait à l’étranger, mais les mines sont propriété d’Areva ou de ses filiales, la situation politique des pays en question n’est pas claire (Areva dit que les pays sont stables politiquement, qu’il n’y a pas de risques, alors que plusieurs acteurs ne partagent pas la même opinion, etc.).
Avant analyser les différentes cartes obtenues, un aspect ressort immédiatement : la plupart des acteurs nigériens ou des acteurs gabonais n’ont pas de sites web, ce qui causera évidement une sous-représentation de ces communautés dans la cartographie. Parmi les acteurs nigériens identifiés n’ont pas de site internet : COMURHEX, COMINAK et SOMAÏR (filiales d’Areva), l’Office National des Ressources Minières (ONAREM) et le hydrogéologue Alain JOSEPH, un acteur qui a plusieurs reprises a pris la parole dans les médias pour dénoncer le « comportement prédateur minier »( source). Par ailleurs, aussi l’association Mounana n’a pas de site internet. Il s’agit de l’association des anciens travailleurs expatriés du site de Mounana au Gabon, qui a pour but d’ « entreprendre toute action administrative, judiciaire, publique aux fins d’établir la vérité s’agissant des conditions dans lesquelles la mine d’uranium de Mounana (Gabon) a été exploitée par la ou les société(s) chargée(s) de l’extraction de l’uranium ; le cas échéant, favoriser l’identification des responsables du non-respect des normes imposées en matière d’exploitation de l’uranium et l’indemnisation des préjudices subis » (source). Selon Jacqueline Gaudet, présidente de l’association : « Il y trop de cancers parmi les expatriés. La COMUF (filiale d’Areva au Gabon) ne répond pas aux demandes de communication des dossiers médicaux. Nous demandons plus de transparence de la part d’Areva et la reconnaissance des maladies professionnelles par la sécurité sociale française.»(source)
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