Le père du pop art japonais est né 1962 à Tokyo. D’abord passionné d’animation, il étudie à l’Université des Beaux Arts et de Musique de Tokyo, la peinture nihon-ga, qui fait se rejoindre tradition nippone et références occidentales.
L’artiste soutient que l’art occidental ne peut pas correspondre à la culture nippone et que les japonais doivent ériger leur propre univers artistique. Il navigue donc entre le pop, kitsch et kawaii (mignon), hérité des manga, et le pur décoratif, tradition ancestrale de l’art japonais, qui se plaît à décrire la nature et le monde, comme changeants et fugaces. Murakami vise à analyser et critiquer les sous-cultures post-modernes du Japon et le caractère consumériste des Japonais d’aujourd’hui. Il s’érige en figure de proue de la culture « Otaku », littéralement culture du « nerd », et se plaît à attaquer la société par le prisme du manga, art de la bande dessinée japonaise qui oscille entre naïveté et perversité. Les Otaku sont des jeunes gens contemporains qui préfèrent se couper de la vie réelle pour rester chez eux (taku signifie « habitation ») et développer un univers virtuel grâce aux manga, à Internet et aux jeux en réseau. Le « Poku », contraction de Pop Art et Otaku, est le terme exact pour désigner le mouvement artistique de Murakami.
L’artiste a fait ses débuts dans le monde de la polémique en 1998 avec un couple sculptural (My Lonesome Cowboy et Hiropon, vendus chacun pour 15 millions de dollars) dont les attributs sexuels disproportionnés (seins et phallus énormes) sont empruntés directement au hentaï, genre pornographique très caricatural du manga, où les fantasmes adolescents prennent vie sous la forme de créatures disproportionnées et lascives qui rappellent les pin-up des calendriers américains. Ces sculptures géantes sont dérivées des « garage-kits », mini figurines érotiques qui alimentent un véritable phénomène de société au Japon : l’attrait pour les très jeunes filles en uniforme ou en costume, les Rorikon. Sous une apparence délirante, colorée et insouciante, les œuvres de Murakami dissimulent souvent de vrais problèmes. La solitude et la frustration de la jeunesse, l’omniprésence du sexe, le traumatisme d’Hiroshima, la bêtise, l’absence d’identité ou encore la prédation sexuelle.