Méthodologie
L’ensemble des effets du PIE et de cette controverse ne se résument pas à la seule explication de ses caractéristiques techniques.
A l’instar de certaines approches, notamment développées en sociologie des sciences et de techniques, et plus particulièrement de la théorie de l’acteur-réseau, nous souhaitons ici déplacer la focale et considérer le PIE comme un objet qui fait bouger les lignes de l’ensemble de l’agencement au sein duquel il s’intègre. Cela signifie concrètement qu’un tir de PIE n’entraine pas uniquement une décharge électrique sur celui qui la reçoit mais qu’il questionne dans le même temps les doctrines de maintien de l’ordre dans un Etat de droit.
Nous tenons donc à insister sur le fait qu’il existe une relation dynamique et complexe entre ce qui est d’un côté considéré comme un objet technique et de l’autre ce que l’on pourrait appeler le social. Un simple tir de PIE suffit à montrer que ces deux dimensions ne sont pas autonomes mais inextricablement enchevêtrées et co-produites dans un même mouvement. Il s’agit donc de prendre en considération les caractéristiques techniques de ce type de pistolet afin de mieux comprendre les enjeux autour desquels tourne la controverse. Le PIE fait et fait faire un certain nombre de choses dans une relation dynamique avec d’autres éléments et ce sont ces relations que cette étude vise à décrire.
Notre étude permet de mettre en évidence le fait qu’il existe aujourd’hui une incertitude manifeste sur les effets que le PIE produit. Certains acteurs avancent que cette incertitude n’est qu’entretenue par d’autres : c’est ce qui fait le sel de la controverse. Nous avons cherché à collecter tous les points de vue et toutes les positions en les traitant de manière symétrique quel que soit le statut de celui ou ceux qui les énonçaient et en essayant de comprendre sur quels fondements chacune de ces positions reposait. Ce que l’enquête nous montre, c’est que la controverse qui s’organise autour de l’objet PIE se développe sur une multitude de dimensions (de la science, du droit, de l’éthique, etc.)
Notre démarche
Nous avons choisi le Pistolet à impulsions électriques comme sujet de controverse car il était au cœur de l’actualité en septembre et octobre 2008. A cette période, le PIE a été très médiatisé en France du fait de deux jugements impliquant respectivement Antoine Di Zazzo, Olivier Besancenot, RAID-H et SMP Technologies. Le point commun entre ces quatre acteurs de notre controverse était l’objet PIE. C’est pourquoi il nous a paru pertinent de travailler sur cette controverse car elle conjuguait plusieurs domaines d’étude : la technique, les scientifiques, la mobilisation des acteurs et de l’opinion publique ainsi que la médiatisation. De fait, le PIE est une controverse régulièrement alimentée par son actualité qui soulève de nombreuses questions et divise les opinions, sans qu’elles parviennent à un compromis.
Le début de l’enquête a été très enrichissant grâce à l’information disponible. Cependant, il a fallut prendre un certain recul pour différencier les informations fondées et celles issues d’expériences personnelles, plutôt marquées anti PIE. Il s’agissait ensuite de chercher les informations techniques et scientifiques provenant de sources différentes. Un travail de veille des médias s’est partagé entre les deux enquêtrices pour pouvoir réagir à chaque nouvel élément apporté à la controverse. Notre première difficulté a été de choisir l’angle d’étude qu’on adopterait pour la traiter. Beaucoup de questions se sont posées : étudions nous le PIE dans le monde ou en France, son usage par tous ou centré sur les forces de l’ordre ? A force de recherches détaillées, d’entretiens réalisés et d’étude des sous-controverses, nous sommes parvenues à centrer notre étude sur l’utilisation du PIE par les forces de l’ordre en France.
Au cours de l’enquête, plusieurs interrogations apparurent : la manière dont le PIE était traité par les médias, les réactions après un tir, qui s’exprimait et surtout comment cela s’intégrerait à notre étude. Notre controverse a fait l’objet de plusieurs rebondissements dans l’actualité nourrissant nos sous-controverses et nous redirigeant parfois vers d’autres angles d’études. Par exemple, la nouvelle de la mort d’un adolescent dans le Michigan suite à une décharge de PIE le 26 mars 2009 a été relayée par l’ensemble des médias français. Nous avions alors décidé de nous concentrer sur les forces de l’ordre en France. De même, l’entretien avec la DGPN a appuyé notre volonté d’étudier la controverse sous cet angle. Notre enquête manquait aussi de précisions sur la partie technique. Ainsi, nous avons pu réaliser l’entretien avec le Bureau de l’armement et des matériels techniques qui nous a aidé à comprendre pourquoi la technique jouait un si grand rôle et comment elle-même était remise en cause par certains acteurs.
Une fois l’enquête aboutie, nous avons essayé de trouver les outils et la mise en forme pour la représenter sur le site Internet. De nombreuses problématiques se sont alors posées. Comment faire paraître les interactions entre les acteurs, leurs implications, leurs positions, leurs arguments de façon claire et lisible ? De plus, nous avons tenté de trouver un système de navigation correspondant à l’enquête menée. Pareillement, nous avons essayé de nous rapprocher d’une navigation choisie, l’une guidée et l’autre libre pour offrir plus d’interaction entre la controverse et l’internaute et permettre d’entrer dans notre controverse sous deux approches différentes. Finalement, notre site Internet est le reflet de l’étude de la cartographie des controverses et de notre enquête sur la controverse PIE