1. Pourriez-vous nous présenter en quelques mots votre rôle au sein de l’UFIP ?
L’UFIP, comme son nom l’indique, est l’organisation professionnelle qui représente les intérêts des sociétés pétrolières sur le territoire français. Elle est composée de quatre chambres syndicales correspondant aux différents segments de l’activité pétrolière sur le territoire français. Pour partir de ce qui est le plus proche du consommateur, nous avons une chambre syndicale de la distribution, qui regroupe les grandes marques qui distribuent du carburant à la pompe, mais aussi qui représente l’activité domestique sur le territoire, notamment les revendeur et les négociants qui font de la vente au consommateur final. Ensuite, la chambre syndicale des transports pétroliers, donc une activité plus logistique, les dépôts, les canalisations. Nous avons aussi une chambre syndicale de raffinage puisque nous représentons les sociétés également qui raffinent du pétrole sur le territoire français, avec des grandes marques, de grands industriels comme Total, Epso, Petro plus, les entreprises de distributions telles que Shell, BP …
Et enfin, il y a une chambre syndicale de l’exploration-production dont je suis le secrétaire général. Je m’occupe des affaires juridiques de l’ensemble de l’UFIP, mais plus spécifiquement des sociétés qui ont une activité d’exploration et de production sur le territoire français, de pétrole brut et de gaz naturel. Nos entreprises sont en effet susceptibles de produire du gaz naturel en plus du pétrole. On représente donc des entreprises titulaires de titres miner d’exploration et de production. Pour l’essentiel, on représente la quasi-totalité des producteurs de gaz naturel et de pétrole sur le territoire français et la quasi-totalité de la production nationale. Et pour l’exploration elle-même, les entreprises qui produisent sont aussi des explorateurs, mais certaines d’entre elles n’ont que les titres d’exploration et là, on ne les représente pas toutes. Ce sont de petites structures. Le paysage de l’exploration production est plus fragmenté, car les entreprises sont de plus petite taille, et historiquement il y a eu un phénomène où les grandes marques les grandes sociétés se sont petit à petit retirées du territoire national, au cours des années 80-90, car étant donné leur nature, leur importance, l’investissement sur le territoire national pour des productions qui étaient à l’époque en déclin, ne justifiait plus l’apport de capitaux et de structures importantes en raison du défaut de rentabilité. Du puis à la pompe, l’UFIP représente une trentaine d’entreprises pétrolières, et l’industrie pétrolière globalement.
2. Dans quelle mesure votre activité est-elle concernée par la controverse du gaz se schiste ?
On reviendra peut être sur la terminologie de controverse, sur le terme et l’usage qu’on en fait. Au titre de notre activité d’exploration production, nos entreprises sont actives concernant l’énergie de façon générale, mais notre rôle, spécifiquement, c’est de défendre et d’exposer notre point de vue sur tout ce qui est relatif aux énergies fossile en général, notamment le pétrole. Le rôle de l’UFIP c’est de parler du pétrole et d’en parler le mieux possible, sur ce que représente le pétrole, ce qu’il a représenté dans l’industrie, sur l’importance qu’il continue à avoir, en terme de consommation, aussi bien pour les particuliers que pour les professionnel, et sa place dans le mix énergétique global. En ce sens, nous tenons pour essentiel tout ce qui est relatif à l’examen des possibilités d’extraction et de recherche d’un ressource nationale.
3. Selon vous, quelle place peut avoir le gaz de schiste dans le bouquet énergétique disponible dans le futur?
Nous ne le savons pas au niveau français puisque nous sommes dans une situation où nous ne pouvons pas évaluer la disponibilité d’hydrocarbures de schiste sur notre territoire, du fait de la loi du 13 juillet 2011 qui interdit l’usage de la technique de la fracturation hydraulique pour la recherche et l’exploitation minière. Or, la seule technique globale permettant à l’heure actuelle de vérifier l’existence potentielle des hydrocarbures de schiste, une fois passées les techniques de recherche conventionnelles pour les premiers indices, c’est la fracturation hydraulique. Mais nous n’en sommes pas là, en France, nous ne connaissons pas ce potentiel.
4. Qu’en est-il du rôle de la politique menée en France autour des gaz de schiste ? La voyez-vous plutôt comme un obstacle, ou quelque chose à négocier ? Y a-t-il des ouvertures ?
Toute l’année 2011 a été mobilisée et motivée autour du sujet politique relatif aux hydrocarbures de schiste. Pour nous, il n’y a pas eu de débat. Il y a eu l’expression d’un certain nombre de réactions locales d’abord, puis nationales, et il y a eu une prise en compte par le politique, quels que soient les bords, au sens large, de ce sujet, pour en tirer des conséquences de nature strictement politique. C’est-à-dire qu’il y a eu une décision gouvernementale de demander un Rapport au CGIET, un rapport administratif d’inspection, destiné à voir le sujet de façon à atténuer l’attention que commençait à avoir le sujet sur le plan de l’exposition politique et médiatique au grand public. Ce rapport s’inscrivait aussi dans le cadre de demandes faites aux opérateurs de suspendre leur opérations au début de l’année 2011 pour ceux qui étaient concernés par une activité relative aux hydrocarbures de schiste. Ceci s’est accompagné ensuite d’une décision de l’Assemblée Nationale d’établir un rapport d’information, qui avait été confié à un parlementaire de la majorité et un parlementaire de l’opposition. Ce rapport n’a pas été poursuivi jusqu’à son terme. Entre temps, des propositions de loi avaient été déposées, de la majorité comme de l’opposition (il y en a eu 4, voire 5) lesquelles ont aboutit, suite à une discussion politique, à la loi du 13 juillet 2011. On le voit, l’ensemble du sujet, sans qu’il y ait eut une quelconque notion d’expertise ou de vérification, sans prise en compte des arguments des uns et des autres, sans débat serein autour du sujet, il n’y a eu que des décisions politiques qui ont été prises.
5. Selon vous, la controverse réside-t-elle plus dans la méthode d’extraction ou dans le gaz de schiste en lui-même?
Les deux sujets sont des éléments de controverse. La technique de la fracturation hydraulique est débattue avec des arguments qui sont ceux qui l’emporté dans cette discussion politique, mais qui ne nous paraissent pas avoir été examinés sous les angles de la portée effective, des conditions effectives d’utilisation de cette technique. En effet, il faut savoir que ces techniques ne sont pas nouvelles. La fracturation hydraulique, combinée au forage horizontale existent dans l’exploitation pétrolière depuis plus de 60 ans. Cette technique a aussi été constamment améliorée grâce au progrès technologique relatif aux techniques pétrolières.
Là dessus, la controverse est venue de la présentation de la situation aux États-Unis qui était réputée pour avoir causé un certain nombre de dommages dans les sous-sols du fait de l’emploi de cette technique, et le documentaire Gasland a constitué une base pour les protestation contre l’exploration et l’exploitation éventuelle des hydrocarbures de schiste sur notre territoire. Mais même aux USA, Gasland est un documentaire militant qui est lui-même controversé. Notamment avec la présentation d’images ne correspondant pas à la réalité actuelle. Il y a des référence à des situations de petits opérateurs qui ont pu, du fait de leur petite taille et de leurs insuffisances techniques avoir quelques défauts dans les conditions dans lesquelles ils réalisaient leurs puits, mais il y a pas d’exemple ou de preuve que ce soit la technique de la fracturation hydraulique qui soit à l’origine des dommages, par exemple, sur les nappes phréatiques. S’il y a eu des dommages aux USA sur les nappes phréatiques, ce sont des défauts éventuels de cimentation des puits, de condition de réalisation des puits de forage, et non pas la technique de fracturation hydraulique en elle-même. On est sur la technicité de la réalisation des puits de forage.
D’autre part le documentaire est lui-même controversé puisque les exemples que Josh Fox donne, avec le briquet et le robinet, c’est une séquence qui n’est pas réalisée dans l’État où il prétend qu’elle est réalisée, mais dans un autre État où il a une présence massive de gaz dit « biogénique » naturellement contenu dans le sous-sol.
Nous ce que nous disons, c’est comme il n’y a pas eu de débat, il n’y a pas pu y avoir d’échange scientifique et technique serein autour des conditions d’utilisation et de réalisation de fracturation hydraulique. Oui, c’est une technique qui a des effets sur la consommation d’eau, mais il faut voir quelles sont les quantités d’eau qui sont vraiment utilisées, comment sont elles réutilisée, retraitées, éventuellement réinjectées. Il faut également s’assurer qu’on peut diminuer les quantités d’eau nécessaires. Cela participe des évolutions techniques et technologiques « naturelle »s des utilisations de la fracturation hydraulique. D’autre part, il y a des produits chimiques utilisés, oui. Cela dit, ils ne représentent que 0,5% de l’ensemble du fluide de fracturation. Ce sont des quantités extrêmement minimes, d’un cocktail variable selon les natures des roches. Ce ne sont pas des milliers de produits comme on a pu le voir, ce sont quelques produits qui sont sélectionnés en fonction de la nature des roches afin d’optimiser le forage. Cela fait partie des débats en cours. Un des objectifs est de réduire encore la part de produits chimiques utilisés, ou de les diversifier, par exemple pour des produits biodégradables, voire d’utiliser d’autres techniques que les produits chimiques pour parvenir aux mêmes buts. Parmi ces buts figurent par exemple celui d’éliminer les bactéries ou d’empêcher la corrosion des tubes. Comme vous le voyez, il existe encre un certain nombre d’éléments sur le plan technique, sur le terrain, où le débat n’a pas eu lieu. Cela aurait pu permettre d‘expliquer, d’apporter les réponse et d’avancer ensemble dans des conditions acceptables.
Je réponds maintenant à la deuxième partie de la question : oui, le gaz de schiste en lui-même est également controversé. En effet, on le voit aux USA, les gaz de schiste ainsi que les pétroles de schiste ont changé la donne en matière d’indépendance énergétique américaine. Grâce aux hydrocarbures non conventionnels, la production de gaz naturels américain a fortement augmenté, ce qui les place en position d’auto-suffisance énergétique. Au lieu d’être importateurs, ils deviennent exportateurs, avec les effets que cela a sur l’économie américaine. Nous sommes cependant en France et en Europe dans des réflexions sur l’avenir du mix énergétique. Un certain nombre de positions ont été prises par des acteurs politiques et des milieux environnementaux qui consistent à dire qu’il faut imiter la consommation des énergies fossiles de façon drastique. Or les projection actuelles montrent qu’à l’horizon 2030, 2035, le pétrole représentera encore 28% de la demande énergétique mondiale. Il faut ajouter à cela la part croissante de la demande en gaz, ainsi que la part d’énergies fossiles qui restera de toute façon importante, car même si la consommation d’énergies fossile diminue, même si on la réajuste grâce au développement d’énergies renouvelables, il y a quand même une demande mondiale globale qui restera croissante notamment avec celle des pays émergents à venir dans les 20 prochaines années. Nous pensons donc qu’il faut non seulement un mix énergétique, mais aussi il faut pouvoir rechercher et trouver toutes les énergies. Toutes les énergies auront leur place dans le développement énergétique globale possibles . Nous pensons qu’il ne faut pas stigmatiser ou nier une ou des énergies, sinon économiquement ça ne tient pas la route. Il faut assurer un mix énergétique équilibré, différent selon les pays, mais nous aurons besoin de toutes les énergies pour faire face à la demande globale croissante.
Depuis il y a 3 ou 4 ans, on voit se développer les discours de l’après pétrole, où l’on se demande comment vivre sans cette ressource énergétique à l’avenir. Avec l’entrée en jeu du gaz de schiste, on réalise qu’en réalité, il existe encore des ressources éventuelles disponibles dans le sous-sol mondial. A partir du moment où il n’y a plus cette notion d’après pétrole, ça remet en cause un certain nombre de notions, selon lesquelles il faut économiser de plus en plus l’efficacité énergétique. L’idée qu’il puisse y a avoir des ressources supplémentaires en fossiles nuit à des discours de nombreux groupes environnementaux : on refuse en bloc d’explorer ces potentiels car ils retarderaient la transition énergétique.
Il y a donc une rupture entre ceux qui sont pour le passage rapide à cette mutation énergétique et nous qui pensons qu’il faut que cette mutation soit accompagnée d’un mix énergétique équilibré qui permettrait de satisfaire la demande en énergie de la planète.
6. Y a-t-il des méthodes d’extraction alternatives possibles? ou en cours d’élaboration?
Oui, il existe d’autres techniques en cours de développement. Mais on n’est pas sûr qu’il soit impossible qu’elles ne suscitent pas également la controverse. Est employée dans certains cas au Canada et aux États-Unis la méthode dite de la fracturation « propane ». A la place de l’eau, on utilise le gaz propane comme méthode de propulsion. Elle reste très limitée. On parle aussi de la technique dite de l’arc électrique, où ce sont des ondes électriques qui assurent la fracturation des roches sans eau et produits chimiques, mais cette technique reste encore très expérimentale et non utilisable à court terme. A l’heure actuelle, la combinaison fracturation hydraulique et forage horizontal reste la technique la plus économiquement adaptée à la recherche et l’exploitation du gaz de schiste. C’est pour cela que nos efforts portent sur l’empreinte écologique de la technique de la fracturation hydraulique et ses évolutions.
7. Entretenez-vous de quelconques relation avec les autres acteurs concernés par cette controverse?
Nous, nous représentons nos adhérents, qui sont concernés par le sujet, notre travail est de représenter leurs intérêts. Nous avons aussi des contacts par nature avec les élus nationaux à Paris, puisque nous avons une profession d’advocates. Nous n’avons pas beaucoup d’antennes locales, nous avons donc beaucoup moins de contacts directs avec les élus locaux. Mais nos adhérents bien entendu sont confrontés au débat notamment avec ces élus locaux.
Nous sommes un lobby, oui , au sens d’exposer et défendre nos points de vues et nos commentaires su l’ensemble des sujets qui concernent notre industrie, c’est le rôle de tous les syndicats professionnels. Nous faisons entendre la voix de nos adhérents.
8. Que pensez-vous de l’engagement de José Bové dans la controverse en France ?
Il n’est pas illégitime que les représentants d’organisations de protection environnementale expriment leur point de vue s’il y a des préoccupations légitimes au regard des conséquences de telle ou telle activité économique de façon générale. Chacun peut s’exprimer. Nous, ce qui nous préoccupe, c’est que tout ceci ne puisse pas se faire dans un cadre serein et de discussion sur ce sujet, de façon objective et sur la base des réalités techniques et économiques, ainsi bien sûr que sur l’appréciation des conséquences économiques, sociales, sociétales éventuelles que peut représenter l’exploitation de ce type d’hydrocarbures dans le monde. Il nous semble pour cela que le débat soit un peu tronqué. Que les préoccupation légitimes soient exprimées, c’est une chose, mais nous ne pensons pas que cela doit se traduire par des interdictions, dont nous sommes, à part la Bulgarie plus récemment, les seuls frappés à l’heure actuelle. Pour nous, le débat est en effet tronqué du fait de positions médiatiques qui ont été exprimées, et du fait aussi de conséquences médiatiques de mouvement locaux, que l’on peut comprendre en terme de préoccupations, mais encore faut-il qu’un dialogue puisse accompagner ces préoccupations.
9. A ce sujet, que pensez-vous de la façon dont les informations relatives au gaz de schiste sont relayées auprès du grand public? Comment pensez-vous qu’il le perçoit?
Mal manifestement, et c’est sûrement très compréhensible que ce soit mal compris, car il y a eu des défaut ou insuffisances de communication en amont, et ça aussi bien nos opérateurs, l‘industrie, nous même en tant qu’organisation professionnelle, nous prenons aussi notre part. Cela n’exclue pas le dysfonctionnement d’autres acteurs, par exemple l‘administratif, chacun doit assumer sa part de responsabilité. Par ailleurs, il ne faut pas exclure cette communication a été d’autant plus brouillée qu’il peut y avoir des intérêts à ce que ce sujet ne passe pas le stade de la discussion, à ce qu’il n’y ait pas de débat.
Cependant, il est vrai que concernant les préoccupations locales, il y a sûrement eu une insuffisance de partage de l’information et de création de conditions de concertation permettant de mieux assurer l’acceptabilité. Nous sommes persuadés que l’acceptabilité peut être créée. Pour cela, il faut des cadres de discussion qui le permettent, mais cela repose aussi sur une organisation administrative. Nous sommes dans un système dans lequel on ne peut pas faire ce que l’on veut sur le territoire, et c’est normal. La France n’est pas le Far West. L’exploration et l’exploitation pétrolières, comme toutes activités sont encadrées. Il faut des permis pour aller explorer. Ensuite, il faut des autorisations pour réaliser des travaux sur une des zones à l’intérieur du permis. On ne peut pas faire n’importe quoi n’importe où à l’intérieur du permis. Un permis, c’est juste un quadrillage sur un certain nombre de kilomètres carrés, où une entreprise envisage d’aller vérifier un potentiel. Ce permis est également limité dans le temps, et il faut choisir un endroit en particulier, où l’on va choisir de mener les activités de recherches. Sachant que même s’il existe en effet un potentiel, on a en général une chance sur 7 ou 8 de trouver effectivement quelque chose. C’est donc une activité à gros risques économiques. Ces encadrements sont des autorisations de travaux octroyés par les autorités publiques, qui sont ensuite l’objet d’autorisations préfectorales, et de participations de toutes les entités administratives déconcentrées auprès des préfectures. Il y a donc un processus réglementaire technique. Que ce processus, avec la modernisation des techniques, le développement des pratiques de participations, les obligations environnementales de concertation, les règles européennes, que tout cela ait besoin d’être davantage injecté dans les procédures administratives de façon à mieux associer les populations aux processus décisionnels et de connaissance des travaux réalisés, oui !
Cela signifierait la modification de certaines réglementations, et nous souhaitons à ce titre là, concernant la réforme du code minier qui nous est avancée, pouvoir nous engager. Il nous semble en effet que la concertation et l’insertion plus claire d’un certain nombre de procédures de discussion sont de nature à améliorer l’acceptabilité de nos projets et de façon générale de l’ensemble des projets économiques et industriels. Il faudrait que ces procédés soient calqués aussi sur des délais économiques et soient encadrés afin de permettre une réelle discussion, car la concertation et la participation ne veulent pas dire, par exemple, l’élévation d’une voix personnelle qui reste sur ses positions quoi qu’il en coûte, comme un « non » systématique. Il faudrait donc toute une organisation et une visibilité. Tout cela entre dans le cadre d’une réforme nécessaire du code minier qui a ces derniers temps bien vieilli.
10. Dans un contexte de débat autour du réchauffement climatique, quel rôle joue, selon vous, le gaz de schiste?
A l’heure actuelle, le seul exemple qu’on a c’est celui des États-Unis, car c’est le seul pays qui exploite massivement le gaz de schiste (c’est ce qui rend d’ailleurs souvent le débat difficile). Les USA ont servi sur le plan média à la fois d’exemple, mais aussi et surtout de repoussoir. Dans les termes du débat, en France, en particulier, ce qui vient des USA est souvent utilisé comme contre exemple, et on répète beaucoup que l’on ne fera pas en France comme aux USA. Néanmoins, c’est une réalité, il y a des conséquences positives liées à l’exploitation des hydrocarbures de schiste aux USA. Il y a des États où l’on est passé brutalement à un taux de chômage inférieur à 4%, comme dans le Dakota. Bien sûr, il y a des conséquences en termes d’afflux de population avec l’effet un peu Far West que cela produit, néanmoins, il y a de l’activité, de l’emploi, des ressources économiques, des ressources fiscales pour l’état. Pour d’autres États, ce sont de bonnes opportunités pour le développement d’autres industries, au lieu d’utiliser du charbon pour les utilités industrielles, ils utilisent du gaz issu du gaz de schiste. 600 000 emplois ont été créés grâce au gaz de schiste.
Cette substitution au charbon est susceptible d’avoir un impact positif sur les émissions de gaz à effet de serre, mais je ne connais pas ces données. Mais le problème c’est qu’on n’a quasiment que l’exemple des États-Unis, il est donc difficile de mesurer quoi que ce soit.
Certaines études américaines, qui pourraient également être sujet à controverse, démontreraient que le bilan avec les gaz de schiste pourrait être plus important en termes d’émissions de gaz à effet de serre qu’avec le charbon . N’étant pas ingénieur dans ce domaine, je pense cependant en effet qu’il faudrait pouvoir sereinement dresser et comparer des bilans. Il y a un débat sur ce terrain aux États-Unis, mais il est pour l’instant difficile d’en tirer quoi que ce soit en termes de réchauffement climatique. La Pologne a fait le choix de lancer une politique favorable au développement du gaz de schiste, afin d’être moins dépendant des importations de gaz russe, c’est une politique en faveur de l’indépendance nationale. Mais au delà de ça, il y a également de substituer le gaz au charbon, et par là-même de réduire éventuellement l’empreinte écologique.
11. Comment pensez-vous que la situation va évoluer en France ? Et à l’international ?
En France, la situation est toujours, et a priori, pour longtemps bloquée. Nous avons deux demandes. La loi du 13 juillet prévoit la mise en place d’une commission nationale de suivi et d’orientation des techniques, qui serait chargée d’examiner le sujet de faire des propositions. Elle aurait la faculté de proposer un cadre pour la réalisation d’expérimentation sur la technique de la fracturation hydraulique. Il ne s’agit attention, non pas de réaliser ces expérimentations, mais de proposer le cadre réglementaire dans lequel ces expérimentations pourront avoir lieu dans le futur. De plus, ces expérimentations ne pourraient être réalisées qu’après la présentation au Parlement d’un rapport, un an après la loi, et sur la base des règles fixées par la commission. Par contre, cette commission se doit d’être réunie, d’être effectivement constituée pour permettre un débat, c’est ce que nous souhaitons. A l’heure actuelle, cette commission n’a pas été mise en place.
Par ailleurs, nous souhaiterions une réforme, une modernisation du Code minier, dans des formes davantage participatives, avec tous les acteurs environnementaux. Dans l’intervalle, ceci créé des difficultés sur l’acceptabilité de tous les projets, même « conventionnels ». Cela génère du débat sur des choses qui ne faisaient pas, a priori l’objet de préoccupations.