ET A L'ETRANGER?


 

Pourquoi est-ce que les méthodes d’apprentissage de la lecture varient selon les langues ?

 

La difficulté d’apprentissage d’une langue est directement liée à la cohérence entre l’orthographe d’un mot et sa prononciation réelle. Cela est lié plus fondamentalement au concept des phonèmes* et graphèmes**. Dans des langues comme le Finlandais, les correspondances entre les phonèmes et les graphèmes sont très rigides ; un phonème correspond à un seul graphème, alors les mots sont écrits exactement comme ils sont prononcés, ces langues sont dites « transparentes ». Par contre, en anglais, les relations entre les graphèmes et les phonèmes sont beaucoup plus compliquées, un seul graphème peut représenter cinq ou six phonèmes et un seul phonème peut être exprimé par plusieurs graphèmes.

 

On voit alors pourquoi la méthode syllabique est plus efficace dans une langue dite « transparente » que dans une langue avec un orthographe plus compliqué et flou. La question de l’usage de la méthode globale ou de la méthode syllabique peut donc changer selon la complexité de l’orthographe des différentes langues.

 

Dans une étude du European Concerted Action on Learning Disorders as a Barrier to Human Development, des chercheurs ont essayé de mesurer l’effet que la correspondance graphème-phonème avait sur les premières étapes de l’apprentissage de la lecture. Ils ont donné des listes de vrais mots et une liste de « pseudomots » (mots correctement orthographiés mais qui n’existent pas dans la langue étudiée, ils ne peuvent donc pas être lus par la méthode globale) aux élèves pendant leur première année de formation a la lecture dans 14 différents pays européens. Les résultats ont montré que les éleves qui parlaient une langue avec des relations phonème-graphème simple ou transparente ont reussi a lire l’ensemble des mots et des pseudomots beaucoup plus facilement que ceux qui parlaient une langue avec des relations graphème-phonème compliqués :

D’après ce tableau, les élèves grecs et finlandais réussissent a lire l’ensemble des mots plus facilement ces langues ont donc les relations graphème-phonème les plus transparentes.

Nous allons maintenant voir quelles méthodes de lecture sont le plus appropriées et le plus utilisées dans les différentes langues en prenant les deux cas les plus extrèmes : l’anglais ( la langue considérée comme la moins transparente) et le finlandais ( langue considérée comme la plus transparente).

 

EN ANGLAIS

 

La langue anglaise écrite est une des langues les plus compliquée. Pour pouvoir lire les 3000 mots monosyllabiques les plus communs en anglais, les enfants doivent connaître environ 600 combinaisons graphème-phonème, c’est beaucoup plus que ce que un enfant peut apprendre systématiquement en une année. En outre, un système syllabique synthétique simple ne peut pas bien marcher en anglais parce que, au niveau des petites syllabes, l’anglais est encore plus incohérent. On doit alors utiliser une méthode mixte qui comprend des éléments de la méthode syllabique et de la méthode globale. Dans cette méthode, l’enseignant enseigne les syllabes communes et cohérentes, mais il enseigne aussi des mots entiers qui ont un orthographe irrégulier. Les enfants apprennent aussi des syllabes compliquées à 4 ou 5 lettres. Par exemple : le phonème « ight » en anglais est utilisé dans plusieurs mots tels que « light », « fright », « might » etc, et on doit apprendre ce phonème en utilisant la méthode globale parce que si on essayait de lire « ight » comme « i-g-h-t » on arriverait jamais à « ight ».

Les programmes scolaires aux Etats-Unis peuvent insister plus ou moins sur l’utilisation de la méthode syllabique ou de la méthode globale, mais la méthode syllabique n’est jamais utilisée seule vu la complexité orthographique de l’anglais. Certains mots ne peuvent être enseignés que par la méthode globale (yacht, chaos, people).

Parce que l’Anglais est plus compliqué, les enfants commencent à 4 ou 5 ans au lieu de 6 ou 7 ans en Finlande. Cependant, malgré ce départ avantagé les étudiants en anglais s’efforcent de lire avec 90% de précision quand ils ont 9 ans alors que les étudiants finlandais peuvent lire avec 90% de précision après leurs 10e semestre.

 

Selon certains chercheurs, l’anglais est une langue tellement compliquée qu’elle est la seule ou l’usage partiel de la méthode globale est impérative.

 

EN FINLANDAIS

 

L’enseignement de la lecture en Finlande est presque purement syllabique. Dans chaque leçon, on apprend à lire, à écrire et à prononcer les mots aux élèves dans des exercices répétitifs. Une fois qu’ils ont appris un certain nombre de lettres, ils apprennent des syllabes qui comprennent uniquement les lettres qu’ils ont déjà apprises. Par ce processus, ils continuent à ajouter les nouvelles lettres et syllabes a leur bagage orthographique.

En Finlande, les enfants commencent à apprendre à lire à l’age de 7 ans, et peuvent lire avec 90% de précision au bout de 10 semaines. Certains disent que le succès des élèves finlandais est dû à l’utilisation exclusive de la méthode syllabique synthétique, en effet, cette méthode marche mieux dans une langue orthographiquement transparente parce que les enfants ne doivent connaître que 30 combinaisons graphème-phonème pour pouvoir lire la majorité des mots en finlandais. Cependant, on ne peut pas dire avec certitude que le succès Finlandais soit lié uniquement à l’usage de la méthode syllabique étant donné sa simplicité d’orthographe.

 

 

*Un phonème est la plus petite unité discrète ou distinctive (c'est-à-dire permettant de distinguer des mots les uns des autres) que l'on puisse isoler par segmentation dans la chaîne parlée (exemple pain—main, le son /p/ est un phonème parce qu’il distingue le mot pain du mot main)

 

**Un graphème est l'unité fondamentale d'une écriture donnée ; le mot est composé sur le modèle de phonème. (Par exemple, la lettre « p » est un graphème, mais les combinaisons « ch » est « ain » sont aussi des graphèmes.)