Boyd, Willard L., "Museums as centers of controversies"
Van der Gucht, D. (1990) L’institution muséale à l’épreuve du marché de l’art moderne. In A. Ducret, N.
Musées en mutation Complément de titre : Actes du colloque international tenu au musée d'Art et d'Histoire de Genève les 11 et 12 mai 2000 / MUSEE D'ART ET D'HISTOIRE, HAUTE-ECOLE D'ARTS APPLIQUES - Paris : Georg éditeur, 2002 - 179 p. ; 24 cm- ISBN 2-8257-0776-7
Du musée au parc d'attractions. Culture et musées, 2005, n° 5, p. 11-121.
Collecter et préserver des objets ont de tout temps été les fonctions centrales du musée, mais l’art contemporain y a apporté une dimension nouvelle : l’exposition. La collecte d’œuvres d’art contemporain par les musées fait émerger une série d’enjeux, depuis la question de la confrontation de l’art contemporain et de la conception traditionnelle de l’art muséal, à des questions pratiques relatives au caractère éphémère de cet art même. Dans Collecting the New, Bruce Altshuler explore ces différents enjeux, prenant pour objet les moments critiques et les tensions nées de l’histoire de la collecte d’œuvres d’art contemporain par les musées.
Altshuler identifie ainsi deux points de tension majeurs : D’une part, la collecte d’œuvres d’art contemporain par les musées donne naissance à un conflit avec la conception traditionnelle du musée, soit une institution supposée préserver des œuvres ayant connu l’épreuve du temps. D’autre part, la création de musées dédiés à l’art moderne et à l’art contemporain, crée une situation de contradiction avec l’objectif traditionnel du musée : préserver à perpétuité.
L’auteur prend notamment en considération le problème de la validation des œuvres d’art contemporain. Depuis le 19e siècle, la conception de l’art muséal a été celle d’une institution supposée préserver et exposer des œuvres qui ont été polies par le temps. Or, les artistes et collectionneurs contemporains recherchent la validation de leurs œuvres dans leur exposition au sein des institutions muséales, lieux de chute des œuvres et chefs-d’œuvre du passé éprouvés par l’histoire.
Les œuvres contemporaines sont validées par leur entrée dans les collections des musées, voire par leur exposition, et sont d’une certaine manière projetées dans le futur et identifiées comme jouant un rôle dans une histoire anticipée. Cela vaut également pour le marché de l’art contemporain, étant donné que le prix des œuvres est purement spéculatif : on place le prix à un niveau relativement élevé si on considère que l’œuvre sera prendra de l’importance dans le « futur historique » de l’art.
La connexion entre histoire de l’art et musées rend la collecte d’œuvres d’art contemporain similaire au travail d’anticipation des prix effectué par les négociants, et tout aussi problématique. La fonction pédagogique du musée, née de la volonté de développer le goût par l’exposition d’œuvres d’art exemplaires, requiert de pouvoir replacer une œuvre d’art, quelle qu’elle soit, dans une narration historique. Or, celle-ci est remise en question par la prolifération récente de nouvelles narrations et de nouvelles pratiques artistiques difficiles à situer dans la narration traditionnelle de l’histoire de l’art.
James Putnam, conservateur du Contemporary Arts and Cultures Programme du British Museum, s'intéresse dans cet ouvrage aux interconnexions entre l'art contemporain et la muséologie et aux relations entre les artistes et les musées. Il se concentre plus particulièrement sur l'influence que la pratique muséologique exerce sur l'art contemporain.
L'auteur s'attache d'abord à illustrer la fascination que l'institution muséale suscite chez les artistes depuis le début du vingtième siècle. Il désigne "l'effet musée" le phénomène par lequel les artistes se sont approprié et ont appliqué les principes de catégorisation et de classement des musées sur leurs œuvres sous forme de collections. L'auteur explique ainsi que certains artistes ont cultivé une obsession pour la collection d'objets souvent sans valeur, assemblés parfois sous forme d'installations qui rappellent les cabinets de curiosités et se positionnement comme des parodies. Ainsi, les artistes imitent des pratiques muséologiques pour traiter des enjeux de propriété, de censure, de préjugé, de privilège et les liens entre le commerce et la culture. Par cette démarche, ils défient la vision culturelle institutionnelle de l'Histoire, et exposent les aspects de pouvoir cachés dans l'institution. Ils mettent à jour l'absence de neutralité du musée et encouragent les visiteurs à interroger ce système d'interprétation. Cette critique institutionnelle des systèmes de pouvoir au sein de l'institution-musée s'est particulièrement développée dans les années 1960.
À la suite de cette remise en cause critique, il souligne une tendance grandissante au sein des musées: l'intervention d'artistes comme commissaires invités. Ces derniers sont sollicités pour sélectionner, arrangent et mettre en scène et labelliser les collection du musée. Ces projets collaboratifs se placent au croisement de l'exposition et de l'installation, brouillant les frontières entre installations et scénographies muséales. Selon l'auteur, ces collaborations permettent de rapprocher le passé et le présent sous une forme nouvelle, avec des scénographes dont le travail n'est pas régulé par les conventions restrictives et les traditions du musée. Cette confrontation de différents points de vue est vouée à enrichir les propos d'une exposition. Outre cette liberté dans la muséographie, de telles expositions collaboratives ont pour avantage d'installer l'art contemporain au sein du musée et de stimuler un dialogue entre l'ancien et le nouveau, les œuvres d'art et les caractéristiques spatiales du musée. Cette récente réforme de la muséologie des expositions permet ainsi d'attirer de nouveaux publics dans l'institution-musée en en faisant un médium, une interface d'échange entre les artistes et les collections patrimoniales. Les artistes investissent des espaces qui offrent de nouvelles problématiques et incitent les musées à s'auto-évaluer. De telles expositions témoignent de la mutation du musée.
Sources
http://www.york.ac.uk/ipup/projects/artheritage/discussion/putnam.html
http://www.museologie.org/fiches_biblio/Fiche%20Stomi.htm
Jean-Michel Tobelem étudie les dernières tendances qui affectent l'institution muséale qui fut pendant longtemps sanctuarisée au sein du secteur non lucratif. Il démontre que les musées sont aujourd'hui de plus en plus touchés par la communication, la commercialisation de la culture, la globalisation et la financiarisation de l'économie. Ces évolutions ont engendré de nouvelles exigences de la part des visiteurs, des impératifs budgétaires croissants, la nécessité de développer des activités commerciales et une intensification de la concurrence entre les différents musées. Désormais, les musées se métamorphosent en organisations hybrides entre le service public et l'insertion dans le marché. Ainsi, les professionnels des musées ont évolué: le scientifique, l'érudit et le lettré doivent devenir tour à tour managers, stratèges et visionnaires. Cette reconfiguration des musées a placé de nouvelles priorités pour la survie de ces institutions: l'organisation de grandes exposition, le financement, l'évolution de professions concernées, l'organisation territoriale, l'impact de l'offre culturelle sur le patrimoine, l'économie locale et les visiteurs, et les nouvelles stratégies de développement qui se multiplient.
Par conséquent, l'auteur désigne les musées par l'appellation Organisation Culturelle de Marché (OCM), ce qui lui permet de mettre en lumière sa thèse: en ce début de 21ème siècle, les musées ne sont plus les temples d'une culture légitime. D'ores et déjà, les musées s'interrogent sur leur utilité, leur fonction sociale, leur nécessité et leur définition. L'auteur considère également que les processus de conservation procèdent de choix politiques et de stratégies économiques, plaçant de plus en plus le musée dans une logique de tourisme et d'événement.
Sources
http://www.revue-espaces.com/librairie/4758/le-nouvel-age-musees-institutions-culturelles-defi-gestion.html
http://www.espacestemps.net/document1878.html