Plan du parcours

    Entretien avec Pascal Schmidt


Contexte de l’entretien :


    L’entretien s’est fait par téléphone et a duré 18 minutes. L’absence d’enregistrement fait que la retranscription qui suit n’est pas parfaitement fidèle aux mots utilisés par le Dr Schmidt. Néanmoins, le fait d’avoir pris des notes pendant l’entretien et d’avoir fait la retranscription immédiatement après garantit une bonne fidélité de celle-ci aux propos prononcés par Pascal Schmidt.


Retranscription de l’entretien :

    Le dépistage néonatal de la surdité en Champagne-Ardenne se fait depuis 2004, et ça se passe bien.
   
    La principale motivation pour lancer ce programme est l’exaspération du diagnostic tardif de la surdité des enfants. Maintenant qu’on a les outils techniques pour faire le dépistage (depuis 1995 environ), il n’y a plus qu’à réaliser le dépistage.

    Pour pouvoir mettre en place le programme il a fallu frapper aux portes, convaincre, jusqu’à la rencontre avec la bonne personne : l’union régionale des Caisses d’Assurance Maladie qui a écouté et accepté de financé le programme en Champagne-Ardenne.

    La technique des OEA a été choisie car elle plus rapide et moins coûteuse.
    Les PEA sont également utilisés en réa-néonat et en cas de détection d’un problème avec la technique des OEA
     Pour pratiquer le test, il est recommandé de le faire pas très longtemps avant la sortie de la maternité, mais rien n’interdit de le faire plus tôt, à cause de questions logistiques notamment (personnel débordé par exemple). En plus, le coût de chaque test est très faible donc même si on le fait trop tôt et qu’on détecte un problème, ça ne coûte quasiment rien de le refaire quelques jours plus tard.

    Si jamais on détecte une anomalie avec les OEA, il n’y a pas une procédure fixe. Ca dépend de la maternité. On peut refaire un 2e test OEA et si le problème se confirme un PEA ou directement un PEA (c’est l’idéal). Le PEA a un coût plus élevé et permette un réel diagnostic de la surdité.
    Avec ce programme, on est passé d’un diagnostic de la surdité en moyenne à 18 mois à moins de 3 mois aujourd'hui.

Réaction des parents :

    L’écrasante majorité est favorable au dépistage, y compris les adultes sourds. Ainsi, le Professeur Pascal Schmidt a été amené à poser un implant cochléaire à une petite fille sourde profonde dont les parents été malentendants car ils voulaient que leur fille ait un minimum d’audition, comme eux.
    Le dépistage est proposé. Il ne peut pas être imposé car il n’y a pas de loi. Un flyer est remis au maman à la maternité pour leur expliquer le dépistage, mais elles sont bien souvent submergées d’informations après l’accouchement, ce qui fait que ce flyer n’est pas toujours lu.

 Les résultats après 4 ans :

    Le travail de départ a beaucoup reposé sur l’analyse des expériences extérieures et à l’étranger. On y lit qu’il y a plus d’un enfant sur 1000 qui est sourd. Or après quelques temps de fonctionnement, on s’est rendu compte que la proportion dont la surdité a été dépistée était inférieure à ce chiffre. Le Pr. Pascal Schmidt a donc regardé les statistiques du dépistage tardif de la surdité pratiqué depuis des dizaines d’années en Champagne-Ardenne et s’est rendu compte qu’il y avait en fait moins de un enfant sur 1000 qui était sourd.
    Ces chiffres sont également les mêmes en Alsace, où le dépistage néonatal est pratiquement exhaustif, en Haute-Normandie, où il ne reste plus que 3 maternités dans lesquelles il n’est pas pratiqué et il le sera d’ici la fin de l’année.
    Avec 4 années de recul, s’il y avait eu des faux positifs, on les aurait détectés avec un dépistage tardif (le dépistage tardif se situant en moyenne à 18 mois). Or tous les diagnostics tardifs qui ont été fait concernaient des enfants nés hors de la région ou pour qui la surdité est apparue après la naissance. à le taux d’erreur est infinitésimal
    Les différentes méthodes (OEA puis PEA, ou 2 OEA, ou direct PEA, …) font qu’il y a des taux d’erreurs intermédiaires différents, mais le taux d’erreur final est le même. Avec les OEA il y a un peu plus de « retest ».

A propos de l’avis du CCNE :

    « C’est un tissu d’âneries » et c’est extrêmement inquiétant car c’est la preuve que le travail a été très mal fait alors que le Comité est normalement très respectable.
    Il faut savoir que l’écrasante majorité des professionnels et des non professionnels (parents notamment) est favorable au dépistage. L’avis du CCNE ne reflète donc qu’un point de vue très minoritaire.
    Point de vue très intéressant où tout est dit : celui de Lucien Moatti dans le Journal faxé de l’ORL. Il a mis toutes ses tripes dedans. L’argument selon lequel le dépistage précoce dirige les enfants et les parents vers l’implantation est « complètement idiot ». En effet, sur 10 enfants sourds, même pas 3 vont être candidats à l’implantation car ça ne concerne que les sourds profonds. Et l’implantation n’est que proposée, ce sont les parents qui décident.
    Le dépistage permet avant tout aux parents de bien s’occuper de leur enfant, pas de l’enfant imaginaire qu’ils croient entendant, mais bien du vrai enfant sourd. Pour cela on met à leur disposition des aides auditives parmi lesquelles se trouve l’implant, mais il y en a d’autre.
    L’hostilité des sourds s’est cristallisée sur le problème des implants (pour des raisons historiques, parce que les ORL ont parfois fait des erreurs), mais en fait cette question n’est qu’une petite partie du problème.