Bilan

La méthode d’évaluation contingente est-elle donc une illusion ou permet-elle la révélation d’un prix pour la nature ? Les débats cherchent à déterminer la capacité de cette méthode à révéler de façon authentique la valeur des biens environnementaux non marchands. Ces débats sont alimentés par les nombreux biais qui sont tant théoriques que méthodologiques.

Pour les détracteurs de la MEC, les biais théoriques la rendent par essence inexacte et invalide. La monétarisation des biens environnementaux, c'est-à-dire la tentative de leur internalisation, mènerait à une impasse. Ceci serait la preuve des limites de la théorie néoclassique.

A l’inverse pour les partisans de la MEC, les biais ne doivent pas être une limite fondamentale à l’utilisation de cette méthode. Il vaut mieux une mauvaise évaluation monétaire qu’aucune information sur la valeur de biens et services environnementaux. Cependant afin de limiter l’impact des biais et rapprocher le CAP déclaré du CAP réel, ils préconisent l’amélioration de la méthodologie, c'est-à-dire de la construction des questionnaires et l’amélioration du traitement des données. La mise à l’épreuve de cette méthode conduit à son perfectionnement par tâtonnement.

S’il n’est pas possible de trancher entre ces différentes positions, on peut cependant noter que l’utilisation de cette méthode est un succès. Ceci est essentiellement dû à sa capacité à répondre à une demande sociale en permettant d’intégrer les aspects non-marchands de l’environnement. Et c’est bien son atout : fournir rapidement au décideur public un prix (CAR ou CAP) censé rendre compte de la valeur d’un bien environnemental. Ainsi la MEC va poursuivre sa sortie des laboratoires et l’ouverture de la controverse à d’autres acteurs que des économistes.

Les conséquences de la mise à l’épreuve de la méthode d’évaluation contingente divergent selon les acteurs. S’il semble que les améliorations de la méthodologie lui permettent actuellement de résister aux épreuves, malgré les biais théoriques et méthodologiques, les détracteurs de la MEC affirment au contraire que la rencontre entre cette méthode et la société conduira à la révélation du « caractère conflictuel des problèmes environnementaux ». Il se produirait alors un renversement du processus décisionnel dans le champ environnemental : les économistes stopperaient la mise en œuvre d’une méthode « antidémocratique » et s’arrêteraient « aux frontières de leur compétences en restant à sa place dans le processus de décision publique ». Ainsi selon un des détracteurs de la méthode d’évaluation contingente, « une véritable démocratie environnementale ne pourra naître que si est reconnu le caractère conflictuel des problèmes environnementaux, ce que nient, dans leurs fondements mêmes, les méthodes d’évaluation monétaire de la nature ».

Il semblerait plutôt que nous connaissons les prémices de l’évaluation monétaire des biens environnementaux. La rencontre entre l’économie et l’environnement amènerait à reconsidérer leurs relations et leurs frontières. Une stricte séparation ne semble aujourd’hui plus possible pour permettre une évaluation économique exacte des actifs naturels.