Maitre Fabrice ORLANDI, avocat et président de l’association « Je ne parlerai qu’en présence de mon avocat ».
Quelles sont les nouvelles problématiques posées par l’adaptation de la reforme de la GAV ? Je vous nomme les aspects négatifs de cette loi. Le premier point concerne le pouvoir de l'OPJ qui a toujours la possibilité de dire à l'avocat qu'il ne lui convient pas, et qu'il faut en trouver un autre. Et c'est hors de question que moi, en tant qu'avocat, j’obéisse à l'OPJ qui me dit « Monsieur, vous ne me convenez pas ». Le deuxième point c'est le contrôle de la GAV de la part du Parquet ,qui n'est pas un juge indépendant,ce que la Cour Européenne a évoqué aussi; il y a donc un problème de ce côté-là, problème qui est toujours dans le nouveau texte. Le troisième point, concerne l'accès au dossier.Cela veut dire qu'un avocat peut être présent, mais qu'il n'a pas accès au dossier. La loi ne le prévoit pas. Cela apparaît un petit peu comme un retour à un avocat « coucou », comme sous la loi du 15 juin 2000. C'est un véritable problème. Le quatrième et dernier point, qui est tout à fait d'ordre matériel, concerne l'indemnisation de l'avocat. Je trouve que ce n'est pas raisonnable de dire qu'on va indemniser 300 euros +150 euros , soit 450 euros. L’avocat va suivre toute la GAV, qui dure 48 heures . Cela fait 7 ou 8 euros de l’heure,ce n’est pas raisonnable. C'est la méthode à la française : on fait les lois, mais après, avec les moyens techniques, on est incapable de les mettre en oeuvre. Les indemnisations juridictionnelles en France sont très loin de celles de nos voisins, par exemple les anglais. C'est quelque chose à revoir mais très rapidement parce que la Cour de Cassation a donné son avis sur l'application immédiate de cette loi-là. Je dirais que ces problèmes sont les vrais problèmes de l'application de la loi sur la GAV. Qu’est que vous revendiquez comme association ? Quel est votre positionnement exact ? On revendique la même chose que les autres professionnels. Je l'ai écrit dans un article de Marianne. On est tous d'accord, il n'y a pas d'avocat qui soit contre. Je pense que cela fait une majorité de l'ensemble des avocats français. Certains mouvements sont tout à fait normaux : ils ont fait la grève de la GAV parce que - évidement - il y a un problème d'indemnisation. C'est un vrai problème et la solution n'a pas été prévue par le texte. Y aura-t-il d’autres changements appliqués à la procédure de la GAV, d’autres réformes dans le futur proche ? J'ai participé à la reforme du 15 juin 2000. Là, déjà, le fait que l'avocat ait eu le droit d'arriver dans un commissariat, c'était une révolution. Je vous invite à relire les journaux de l’époque et vous verrez quelles étaient les réactions des policiers, parce que c’était une zone d’ombre – le commissariat – et y faire entrer les avocats n'était pas quelque chose que la police acceptait. Aujourd'hui, c'est aussi un très grand pas qui a été franchi, une très grande victoire des avocats, mais c'est surtout la grande victoire de la démocratie, de la justice et du droit de la défense. Ce n'est pas seulement la victoire des avocats, mais aussi la victoire des policiers. Il y a un autre débat sur le fait que la présence des avocats va garantir les auditions des clients. Mais il faut faire attention, ce n’est pas nous les garants des déclarations de nos clients. Mais en tout état de cause, par exemple en Russie l'avocat est présent en garde à vue de manière obligatoire. Maintenant c'est comme toutes les lois : vous mettez les lois qui changent un peu des habitudes dans n'importe quel système, et c'est déjà une révolution. Et cette fois, c'est une révolution aussi pour les policiers, parce que les avocats vont être présents. On a réussi en 2000 et on va réussir en 2011. Après, il faut que cette loi soit adoptée et qu'elle évolue notamment en matière de crimes spécifiques - comme le terrorisme - parce qu'il faut que ça évolue sur ce champ aussi, mais ce qu'on a fait n'est déjà pas mal. Avec la réforme, la GAV restera-t-elle un outil de mesure de l'efficacité du travail des policiers ? Comment est-il alors possible de mesurer l'efficacité de la GAV et l'efficacité de travail des policiers ? La Cour Européenne des Droits de l'Homme va-t-elle inspecter l'adaptation de la réforme en France ?
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