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Marie Veluire

Le docteur Marie Veluire est gynécologue et sexologue. Elle exerce en tant que gynécologue à la clinique Caron à Athis Mons et en tant que sexologue sur Paris (2 jours par semaine). Selon le docteur Veluire, l’orgasme n’a qu’une fonction de plaisir et aucunement une fonction de reproduction. En tant que sexologue, elle nous a expliqué le mécanisme qui mène une femme à avoir un orgasme. Elle a pris comme support la courbe de Master et Johnson et le rapport Hite. Elle distingue l’orgaste qui est le réflexe physiologique à la stimulation sexuelle et l’orgasme qui est la réponse psychologique et qui est justement ce que les femmes appellent orgasme. Ainsi, une femme peut avoir un orgaste sans orgasmer. L’inverse est plus rare. L’orgasme est donc subjectif et non objectif. De plus l’orgasme vient d’un apprentissage (une femme de 40 ans peut tout à fait découvrir l’orgasme). De plus, le docteur Veluire est spécialisée dans le désir sexuel. Le désir sexuel est une étape nécessaire à l’excitation et à l’orgasme. C’est un phénomène compliqué qui regroupe de nombreux facteurs : physiologiques (hormones) et psychologiques (sécurité affective, identité sexuelle par exemple). Le docteur Veluire considère aussi que la vision de l’orgasme féminin a beaucoup évolué depuis 50 ans. Avant on n’en parlait pas, mais il y a eu dans les sociétés occidentales une revendication du plaisir féminin, une volonté de se libérer des contraintes de la procréation. On a dissocié orgasme et reproduction. On arrive au contraire dans une société de résultat : les femmes doivent avoir des orgasmes. Or cela est contradictoire, car la pression sociale qui s’exerce empêche la femme d’atteindre l’orgasme (elle doit se laisser aller : c’est le syndrome de la pute et de la madone, la femme doit se laisser aller, mais elle a peut de l’image qu’elle pourrait rejeter). Concernant le « viagra féminin » Marie Veluire précise que c’est en fait un antidépresseur. Ce n’est pas une pilule de l’orgasme, mais du désir. Or la part hormonale étant faible dans les causes du désir, il est peu probable selon elle qu’une telle pilule est de l’avenir. Selon elle, les orgasmes clitoridien et vaginal sont liés. En effet, la pénétration stimulerait le clitoris via des corps spongieux entourant le vagin. C’est pourquoi le vagin est en fait une zone sensible non pas aux frottements, mais à la pression exercée. Il n’y aurait donc pas de controverse entre orgasme clitoridien et orgasme vaginal. Elle nous a aussi parlé du problème de l’apprentissage sexuel qui se fait chez certains hommes par l’intermédiaires des films pornographiques et ont donc l’image d’une sexualité caricaturale et ne correspondant pas à la réalité peut influer indirectement sur l’orgasme. Enfin, elle pointe l’innocuité de la psychanalyse. Selon elle, la psychanalyse permettrait de ne soigner que 30% des femmes ayant des problèmes avec leur sexualité, ce qui correspond en fait à la proportion de femme qui s’en sortent généralement même sans consultation.

Pierre-Henri Gouyon

Pierre-Henri Gouyon, biologiste français spécialisé en sciences de l’évolution (génétique, écologie). Il est diplômé de l’institut national agronomique de Paris, docteur en écologie, en génétique, et possède un DEA en philosophie. Il a beaucoup travaillé sur les relations entre sciences et société. Pierre-Henri Gouyon a commencé par brosser rapidement les controverses apparues sur l’orgasme au long du XXe siècle : autour de l’orgasme clitoridien avec Freud puis avec Master et Johnson,… Pour lui, tout comme pour Lloyd ou Symons, l’orgasme féminin n’a aucune fonction particulière. Il utilise la même justification ; l’orgasme féminin serait un reliquat de l’orgasme masculin : le clitoris proviendrait du pénis masculin (du fait de l’indifférenciation sexuelle au premier stade du développement embryonnaire). Il donne l’exemple d’un organe de l’être humain qui a aussi été controversé : les tétons. Une théorie prétendait avant que les tétons auraient été conservés chez l’homme car l’être humain avait été hermaphrodite. Or des études ont montré que ce n’était pas vrai. Une autre théorie disait encore que dans les temps anciens, quand la femme n’avait pas de lait, l’homme l’a remplaçait. Cette théorie aussi a été invalidée. Il cite la foire aux dinosaures du paléontologue américain Stephen Jay Gould : les tétons masculins seraient en fait des reliquats des seins de la femme, n’ayant aucune utilité pour les hommes et provenant justement du stade embryonnaire d’indifférenciation sexuelle. Il pense que cette théorie est la bonne. Toutefois, il pointe le fait que la plupart des femmes disent préférer un homme avec des tétons, ce qui pourrait expliquer que les tétons aient été conservés dans un but de reproduction. Pour Pierre-Henri Gouyon, l’orgasme vaginal n’existe pas. Il constate que les études sur l’orgasme sont assez peu nombreuses. Il explique cela par le fait que pour mener des recherches il faut soit qu’il y ait un intérêt financier à la clé, soit un espoir de faire des découvertes révolutionnaires. Or dans le cas de l’orgasme, il semble que les soutiens financiers n’y voient aucun intérêt, ni les centres de recherche. Il n’y a pas de lobbying pour la recherche sur l’orgasme. Selon Pierre-Henri Gouyon, la plupart des évolutionnistes ne considèrent pas que l’absence d’orgasme soit due à des raisons génétiques (et seraient donc due à des raisons psychologiques). Pour lui, cela reste du ressort des sexologues de comprendre pourquoi les femmes ont un orgasme ou non. Enfin sur la question de l’imbrication entre les résultats des théories sur l’orgasme féminin et la représentation de la sexualité de la femme dans la société, Pierre Henri Gouyon considère que ce n’est pas à la biologie de dicter les normes sociales. Pour lui, il serait dangereux d’assimiler la recherche sur l’orgasme féminin à la volonté de libérer la sexualité féminine.

Odile Buisson

Le titre de son dernier livre, Qui a peur du point G?, sorti en 2011, indique bien l’avis que la gynécologue obstétricienne se fait sur la question. Au cours de l’entretien, elle s’est, à plusieurs reprises, indignée du peu de recherche effectuées dans le domaine de la sexualité féminine. Après nous avoir exposé la complexité du phénomène de l’orgasme féminin, elle a bien insisté sur l’importance de mettre en place des recherches croisées. Elle a rappelé que l’orgasme était à la fois un phénomène physique et cérébral. Ainsi, de nombreuses disciplines, la biologie, la physiologie, l’anatomie, mais aussi la psychologie, ou encore la sociologie doivent être mises à profit afin d’espérer arriver à des conclusions. Lorsqu’on lui demandait vers où fallait-il orienter les recherches, elle nous répondait qu’il fallait «chercher partout». Cela signifie également que les recherches sont encore peu nombreuses. Elle a également insisté sur ce fait. Non seulement, les recherches ne sont pas en route, mais elles n’ont pas non plus beaucoup été avancées auparavant. On ne dispose pas de bases de données sur lesquelles se fonder. Selon la gynécologue, les bases de données les plus fréquentes sont celle offertes par les sondages, mais elle les récuse les qualifiant de biaisées. Selon elles, ces sondages sont mal conçus, et n’apportent pas d’informations pertinentes. Si on lui avait posé la question, «Ressentez-vous une zone de sensibilité de la taille d’une pièce sur la partie antérieure de votre vagin durant l’orgasme?», question du sondage effectué par ses détracteurs à propos de son livre, elle aurait elle-même répondu négativement. Pourtant, elle refuse que des conclusions, négatives ou positives, sur le point G soient construites à partir des résultats de ces études. Elle rappelle néanmoins qu’ils peuvent fournir des informations à prendre en compte mais ne suffisent pas à prouver des conclusions scientifiques. Selon elle la controverse porte sur le point G et non pas sur l’orgasme. Les recherches sont déjà insuffisantes sur le point G, alors qu’il a réussi à mobiliser une partie du monde scientifique, et elles sont encore moins développées pour l’orgasme féminin, «pour l’orgasme féminin c’est encore de l’ignorance». Enfin, dans son costume de féministe, elle emprunte l’expression «d’organe politique» en parlant du clitoris. Pour elle le clitoris est une contrepartie féminine non moindre du pénis de l’homme, et cela permet de s’affirmer en tant que femme, de révoquer la loi «des puissants qui pissent debout». Les femmes ont aussi quelque chose, et cette organe dévoué au plaisir qu’est le clitoris, leur permet d’avoir également un rôle dans le rapport sexuel, et donc par extrapolation dans les rapports en société, autre que celui de l’être dominé dans sa fonction reproductive.