CONTROVERSE DU BISPHENOL A

Faut-il interdire
le bisphénol A ?

Nous sommes quotidiennement exposés au bisphénol A, et depuis la fin des années 1990, le bisphénol A est sujet à controverse autour de la question fondamentale de sa toxicité potentielle pour l'homme.

Pourquoi est-ce difficile de statuer clairement sur les dangers du BPA ?

Dans quelle mesure déterminer la toxicité du BPA de manière tranchée aurait d’importantes conséquences tant dans le domaine politique que dans le domaine économique ?

Ainsi, on peut se demander s’il faut interdire l’utilisation de BPA dans l’état actuel des connaissances ou bien si des mesures intermédiaires suffisent comme celles qui ont déjà été appliquées.
Ce sont sur ces incertitudes que repose le débat et que nous approfondirons.

Qu’est ce que le bisphénol A ?

Avant d’aller plus loin dans la controverse, voyons qui en est le principal acteur. Le bisphénol A (BPA) est une molécule de synthèse utilisée pour fabriquer des plastiques durs de type polycarbonate et des résines époxy. Ainsi, il se retrouve dans la composition de nombreux objets du quotidien. Or, le BPA peut s’extraire spontanément, bien qu’à très faibles doses, des matériaux qu’il compose et ce d’autant plus qu’il est chauffé ou traité avec des détergents. Par conséquent, le BPA se retrouve dans notre organisme (chez plus de 90% de la population occidentale). Ce constat a mené les scientifiques à s’interroger sur les effets potentiels du BPA sur le corps humain : est-il toxique ? Si oui, à quelle dose ?

Le débat sur la toxicité effective
du BPA divise les scientifiques

La toxicité potentielle du BPA est reconnue. En effet, cette molécule est considérée comme une substance reprotoxique de catégorie 3, c’est-à-dire « substance préoccupante pour la fertilité dans l’espèce humaine et/ou pour l’homme en raison d’effets toxiques possibles sur le développement ». Des évaluations de risque pour la santé menées par l’EFSA ont conduit à établir une dose journalière admissible (DJA) de 50 µg/kg/j en dessous de laquelle les risques de toxicité sont considérés comme quasiment inexistants.
Pourtant, la toxicité effective du BPA n’est pas encore résolue. Deux théories s’affrontent autour du seuil d’exposition admissible. La première considère que le BPA n’est toxique qu’à partir d’une certaine dose, la DJA. L’exposition réelle étant inférieure à la DJA (0,033 µg/kg/j pour un adulte), il n’y a pas lieu de s’inquiéter.
En revanche, la seconde théorie stipule qu’avec une absorption régulière à faible dose le BPA a une forte incidence sur l’organisme. Par exemple, l’INRA a démontré que le BPA est un perturbateur endocrinien, un leurre hormonal. Puisque les hormones sont impliquées dans des mécanismes qui sont stimulés à faibles doses, le respect de la DJA n’empêche pas la perturbation de l’organisme par le BPA.
Les perturbations ne seraient pas moindres, elles toucheraient les fonctions de reproduction, le développement neuronal ou favoriseraient l’apparition de cellules tumorales et cancéreuses. Cependant, ces travaux manquent de crédibilité auprès des industriels et des politiques car certaines études manquent de rigueur.

Quand l’incertitude plane,
quelles mesures adopter ?

La controverse s’étend bien au-delà de la sphère scientifique. Face à des incertitudes, il faut adopter des mesures politiques afin de protéger au mieux la santé publique. Donc en réaction aux publications scientifiques, aux expertises et aux contre-expertises, les institutions publiques ont décidé d’appliquer le principe de précaution. Suite à l’interdiction de la production et de la commercialisation de biberons contenant du bisphénol A au Danemark (mars 2010) et en France (juillet 2010), ce sont tous les Etats membres de l’Union Européenne qui, le 1er mars 2011, ont du interdire la fabrication de biberons en plastique contenant du bisphénol A.
On peut se demander pourquoi seuls les biberons se sont vus interdire une composition en BPA. Selon la commission européenne, c’est parce que les nourrissons sont plus exposés que les adultes. Selon Michel Loubry, directeur de Plastics Europe, « l’interdiction du BPA dans les biberons est purement émotionnelle » car elle touche l’opinion publique via les enfants. La cohérence voudrait que le BPA soit interdit partout, ce qui est techniquement impossible : il n’existe pas encore de substitut ayant les mêmes qualités et étant sanitairement sûr pour tous les produits contenant du BPA.
Cet argument est avancé par M. Loubry pour qui le principe de précaution ne peut être pleinement appliqué du fait de l’absence de substitut.
Il apparaît que des enjeux économique sous-tendent la controverse : les plastiques sont extrêmement utilisés et la production mondiale de BPA est de 3 millions de tonnes par an. Cela mène des ONG comme RES (Réseau environnement santé) à critiquer le lobby industriel. D’un autre côté, les industriels critiquent la diabolisation médiatique du BPA (seules les études affirmant la dangerosité seraient communiquées).
L’opinion publique peine à avoir des informations claires : les conflits d’intérêts semblent entourer cette controverse. C’est pourquoi nous essayons grâce à ce site de vous montrer tous les enjeux de cette controverse et de montrer leurs interactions.