Et derrière les questions d'apparence viennent celles du consentement -ce qui nous fait replonger dans les définition légales de ''majorité sexuelle''. Comme nous le demandions à Ivan Guitz, la majorité sexuelle est fixée en France a 15 ans, et donc au delà de 15 ans ce n’est plus de la pédophilie. Alors, comment appelle-t-on cela à 15 ans ?
« L’histoire de 15 ans, la justice n'est pas très stricte avec ça. Une gamine de 14 ans peut avoir une vie sexuelle avec un majeur sans que forcément on aille trop ennuyer le majeur. Après tout dépend du contexte, du contexte familial, de la relation qui se crée. La question de la majorité sexuelle et la pédophile sont quand même deux choses différentes. On sait qu’il y a des femmes de 14 ans qui ont une vie sexuelle qui ne justifient pas qu’on aille embastiller …Il y a des textes qui font que la notion de consentement n’est pas reconnue en dessous de 14 ans. Mais il y a des situations où on va pas forcément… Disons qu’une fille de 14 ans avec un garçon de 18, dans une relation consentie, la justice a d’autres chats à fouetter que d’aller persécuter ce genre de situations. Après par contre une fille de 12 ans avec un mec de mon âge là ça pose problème effectivement.»
L'écart d'âge, comme on va le voir, est ainsi un critère majeur dans nos représentations : la pédophilie apparaît quand l'écart se creuse entre deux partenaires et que l'un de ceux ci n'est pas un adulte.
Mais peut-on imaginer des jeunes, des enfants, qui diraient être consentant, mettons à 12-13 ans ? « C’est le discours habituel qu’on avait, qu’on a de moins en moins parce qu’on sait que ça passe plus de l’adulte qui dit « c’est lui qui a cherché ». ça n’a aucune espèce d’influence sur le jugement. Alors avec la nuance de toute à l’heure, si c’est une fille de 14 ans avec un mec de 18, ça passera plus facilement, mais quand c’est vraiment un enfant avec un adulte, clairement. La notion de majorité sexuelle elle a du sens par rapport à ça ; à partir du moment ou y’a une emprise de l’adulte sur l’enfant, on considère que la notion de consentement n’a aucune valeur. », assène Ivan Guitz.
De même, la psychiatre Paule Lurcel souligne que le cadre très particulier d'une sexualité pédophile c'est qu'elle se déroule avec « des enfants, qui ne sont par définition pas consentants parce qu’ils ne savent pas de quoi il s’agit, la sexualité enfantine étant très éloignée, très différente de celle des adultes, et donc condamnable à ce titre. Et la personne pédophile ne peut pas ne pas savoir, parce que c’est comme l’inceste, on le sait. »
Pour ce qui est de la pédopornographie, comme le rappelle Isabelle Wattier dans son étude ''La lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie et la majorité sexuelle : la consécration d'une disparité'', si la «responsabilité pénale pour des faits liés à la pédopornographie peut être exclue dans trois hypothèses (art. 3.2.) », notamment «lorsque des faits de production et de détention de matériel pornographique impliquent des personnes ayant atteint la majorité sexuelle lorsque ce matériel est produit et détenu avec leur accord et réservé à un usage privé [, le] consentement n’est toutefois pas valable lorsque celui qui l’obtient a pour ce faire abusé de son âge plus avancé, de sa maturité, de sa position, de son statut, de son expérience ou de l’état de dépendance de la victime à son égard. »
De fait, « le législateur national ne peut en aucun cas exclure la responsabilité pénale pour les infractions de production et de détention de matériel pornographique lorsque les mineurs impliqués n’ont pas atteint la majorité sexuelle. Par ailleurs, l’accord des mineurs ayant atteint la majorité sexuelle doit être exempt de tout vice. »