Enjeux géopolitiques et économiques

Ce volet de la controverse est indissociable de celui, central, des conséquences sanitaires liées à l’extraction de l’uranium. Et cela pour deux raisons : d’une part, parce que les opérations économiques et géopolitiques autour de l’extraction de l’uranium (course au minerai, accords entre l’industriel, la France et les pays concernés conclus dans le secret, relations entretenues avec des régimes dictatoriaux…) font l’objet de vives critiques de la part des associations de soutien aux populations, de la Criirad et des ONG anti-nucléaire. C’est dans ces controverses, en effet, que les opposants à l’activité minière d’Areva - ou au nucléaire de manière globale – trouvent tout un autre panel d’arguments visant à mettre un terme à cette activité d’extraction. Et d’autre part, dans le processus de reconnaissance de l’impact environnemental et humain de cette industrie, les rapports de force établis entre les travailleurs et les industriels, mais aussi les populations, les États, les associations locales et ONG, se sont créés sur des décennies au travers d’autres problématiques, davantage économiques et politiques.

La recherche et l’extraction du minerai d’uranium est la première étape vers la création de l’énergie nucléaire. Aussi, cette activité, comme toutes celles qui constituent la chaîne de valeur du nucléaire civil, est au cœur de problématiques économiques et géopolitiques majeures. Promouvoir l’énergie nucléaire, chercher à la développer ou mettre en cause sa légitimité impliquent, pour tous les acteurs, de considérer la question première de l’extraction de l’uranium. Ainsi, cette rubrique sera consacrée aux enjeux économiques, politiques et géopolitiques propres à l’activité de l’extraction, mais toujours reliés à la question du choix énergétique que constitue, en France, le nucléaire.

Quels sont ces enjeux ?

Ils concernent en premier lieu les questions des ressources en uranium, de la rentabilité des sites, des réserves que se constituent les industriels, du marché des matières premières. Pour Areva, le modèle économique en place dans ce domaine est stable. Pour les détracteurs du nucléaire en revanche, les incertitudes vis-à-vis de la disponibilité de ce minerai et le coût de l’extraction sont des arguments suffisants pour considérer le nucléaire comme une énergie qui ne tiendra pas à long terme et chercher des alternatives.

De même, la question de l’indépendance énergétique, qui est un des arguments-clés des industriels du nucléaire, notamment d’Areva, et remise en cause par de nombreux observateurs. Selon eux, le fait même d’extraire l’uranium à l’étranger avant de l’importer en France est incompatible avec l’idée même d’indépendance énergétique.

Par ailleurs, les relations entre la France, pays exploiteur, et les pays où l’uranium est exploité, sont critiquées. Les contrats passés entre Areva et le gouvernement français avec les gouvernements africains notamment dans l’implantation et la gestion des sites miniers sont sources de conflits. Ainsi par exemple, pour les observateurs Wise et Somo, l’extraction de l’uranium au Gabon et au Niger n’aurait jamais enrichi ces pays africains. D’autres détracteurs accusent la France de "néocolonialisme".

Enfin, si l’on reste dans le champ national, l’extraction de l’uranium est, comme le choix de l’énergie nucléaire, un choix politique. Une décision motivée, selon les détracteurs du nucléaire, par des jeux d'influence. À l’inverse, les défenseurs de cette énergie veulent souligner son caractère, selon eux, indispensable. Un nouvel argument, celui de la "propreté" de cette énergie (propre pour signifier qu’elle est peu émettrice de CO2), accompagne désormais leurs discours visant à légitimer le choix du nucléaire.