Médias et controverse
Comme dans toute controverse, les médias jouent ici un rôle prépondérant. Ils activent la controverse, initient le débat, l’animent et l’alimentent de telle sorte que parfois, des mesures sont prises : la controverse se résout ou tout du moins se stabilise. Sur les problématiques liées à l’extraction de l’uranium et à ses conséquences sanitaires, les quelques reportages réalisés sur le sujet ont été remarqués. Et si l’accident de Fukushima a relancé le débat sur l’énergie nucléaire, le sujet spécifique de l’extraction de l’uranium reste encore traité que de façon sporadique sur les médias traditionnels, trouvant sa médiatisation du seul côté d’Internet. À l’heure où les associations africaines et leurs partenaires que sont Sherpa ou la Criirad peinent à faire reconnaître le lien de causalité entre les pathologies des travailleurs des mines et des riverains à l’exposition aux substances radioactives issues de l’activité minière, la médiatisation, en France, de leur cause, constitue un espoir de sensibiliser l’opinion et les autorités à leur combat, et d’obtenir, à terme, des résultats.
Médias traditionnels et thématiques abordés
Lorsqu’il s’agit de parler du nucléaire, c’est souvent à travers le prisme environnemental, et bien-sûr, sanitaire. Certains journaux comme Le Monde ou Libération traitent régulièrement de la question du nucléaire dans leur rubrique quotidienne « environnement ». Depuis Fukushima, de nombreux dossiers spéciaux ont été accordés dans les rédactions presse et télévisées, « submergées par l’émotion nucléaire », selon les termes du journaliste Samuel Gontier. D’autres thématiques ont surgi, comme la question du secret nucléaire, des lobbies, etc. À l’instar de Fukushima, les sujets abordés concernent davantage la question des risques et de la sécurité au sein des centrales, ou encore la question des déchets. Ces sujets en effet sont les plus connus de l’opinion publique. Par ailleurs, le sujet du nucléaire est largement abordé par la presse économique (les Échos, le Journal des finances) qui font été des nouveaux contrats, partenariats ou toute actualité des industriels français Areva et EDF notamment.
Finalement le sujet de l’extraction de l’uranium n’est que très faiblement traité. Deux documentaires seulement ont marqué l’opinion – sans doute pour leur approche singulière de l’industrie nucléaire, par les mines ; ils sont devenus des références pour les acteurs associatifs : le documentaire Uranium : l’héritage empoisonné de Dominique Hennequin, diffusé en 2010 sur la chaîne Public-Sénat (source), et le documentaire Uranium, le scandale de la France empoisonnée qui traitait notamment des anciens sites miniers du Limousin, diffusé en février 2009 dans l’émission Pièces à Conviction sur France 3 (source).
Internet : le média des détracteurs des conditions de l’exploitation du l’uranium
Internet est le média de l’alternative à la « propagande officielle » (Stéphane Lhomme). Sur Internet, les ONG comme Greenpeace ou le Réseau Sortir du Nucléaire bénéficient d’une belle audience car elles mettent en ligne des contenus militants attractifs, comme des vidéos pédagogiques (voir par exemple une vidéo sur l’extraction de l’uranium) ou des clips-détournements des publicités d’Areva, qui « font le buzz » (source). Sur la question spécifique de l’extraction de l’uranium, Internet est la plateforme de publication des rapports d’expertise de la Criirad. Internet est en outre le seul espace d’expression que peuvent investir les associations locales, africaines, pour témoigner de leurs missions sur le terrain.
Le besoin de médiatisation
On constate qu’il s’effectue un véritable travail collaboratif entre les associations « de terrain », préoccupées par les questions relatives aux conditions d’extraction d’uranium et les grandes ONG. Un relais se met en place : Greenpeace ou le Réseau Sortir du Nucléaire diffusent les rapports et les enquêtes effectuées localement. L’enjeu est de taille pour ces « petites » associations : parvenir à se faire connaître de l’opinion française, et avant cela de trouver un relais médiatique en France, le pays qui « exploite » leur région. Dans la même optique, certaines associations de défense des victimes visant la reconnaissance juridique des victimes françaises expatriées, comme l’association Serge Venel ou Mounana, ont choisi de se concentrer sur les victimes françaises : la tâche juridique et moins difficile et la facile à obtenir.
La controverse autour des mines d’extraction bénéficie d’un relais médiatique moindre que les controverses liées aux centrales et usines de retraitement. Si les deux documentaires télévisés diffusés ont prouvé qu’on pouvait attirer l’attention de l’opinion sur le sujet de l’extraction et réactiver le débat, la controverse minière reste moins spectaculaire, moins visible, car également éloignée. Elle ne fait pas partie des priorités des rédactions, c’est sur Internet donc que se joue la contestation.