Cette cartographie du web a été réalisée à partir d’une sélection de 80 sites correspondant à tous les acteurs de notre controverse : artistes, musées, galeries réelles et virtuelles, blogs d’amateurs, institutions publiques… La cartographie permet de visualiser les sites les plus importants en fonction des liens entrants vers ces sites. Les clusters sont représentés par des amas de points et mettent en évidence des réseaux denses de sites internet.

A première vue, cette cartographie confirme ce que nous avons constaté par notre enquête : si on peut penser que le monde du street art est uni à priori, il n’est en fait pas si homogène.

Le réseau sur la toile est effectivement diffus. Nous pouvons faire de cette cartographie 4 observations majeures:

  1. Le cluster le plus important se forme autour du célèbre street artist britannique Banksy. Il est ainsi cité par ses pairs (Jean Michel Basquiat, artiste contemporain) et constitue aussi une référence auprès des institutions culturelles (Musees-art référencie tous les musées d’art du monde…). Banksy fait beaucoup parler de lui quand ses œuvres sont effacées des rues de Londres ou encore lorsqu’il expose « sauvagement » ses œuvres dans les musées les plus prestigieux tels que le tate Britain et le Louvre. Banksy fait aussi l’actualité puisque il expose ses œuvres au Bristol Museum depuis le 13 juin. C’est sa première exposition institutionnelle dans sa ville natale. Il est en quelque sorte, le précurseur de l’institutionnalisation, celui qui a imposé ses œuvres aux institutions culturelles et dont les toiles sont vendues des milliers d’euros auprès des collectionneurs et auprès de stars.
  2. Cette cartographie nous enseigne aussi que les artistes peuvent compter sur les galeries virtuelles, les blogs et les portails pour faire parler d’eux. Un cluster se forme en effet autour du site Ekosystem, un portail réunissant des photos de graffitis entre autres et jouant le rôle de galerie virtuelle. Sans surprise donc, ce site sert surtout de relais aux artistes (Missvan, Mikegiant, Banksy…). De la même manière, Graffiti.org diffuse les images de graffitis des murs du monde entier et rend visible notamment des artistes tels que les Space Invaders dont les mosaïques sont présentes dans de très nombreuses villes du monde, ou encore Alexone. Fatcap, blog sur le graffiti, fait aussi émerger un petit réseau vers les artistes mais aussi vers les autres galeries virtuelles.
  3. Autour du Centre Pompidou, gravitent d’autres sites d’institutions culturelles  telles que le Palais de Tokyo ou la Maison Rouge. Ceci laisse penser que ceux qui font « l’art officiel » se lient pour appréhender au mieux le street art qui émerge seulement dans ces institutions officielles. Il s’agit aussi peut être de la loi des séries. Si un musée a sauté le pas en exposant du street art, il se peut que d’autres vont se lancer. Les musées jouent le rôle de prescripteur entre eux.
  4. On peut remarquer enfin que le journal Libération est lié au site du centre Pompidou. La presse se fait donc l’écho du street art à partir du moment où les institutions d’art de renom l’intègrent au sein de leurs murs. Nous avons effectivement pu constater à quel point un évènement, tel que l’exposition Tag au Grand Palais, a été médiatisée. Cependant, considérant cette cartographie, la presse semble timide, les sites d’information restent effectivement très isolés.

Au final, ce qui est vrai dans la ville, l’est aussi sur le Net puisque ce qui fait vivre le street art sur la toile sont avant tout les blogs amateurs et les galeries virtuelles qui diffusent à une vaste échelle les créations. Les pratiques alternatives ou personnelles que sont les blogs devancent les sites officiels en matière de contenu relatif au street art. Il est bon de rappeler qu’avoir beaucoup de contenu ne signifie pas être lu. L’audience existe surtout sur les sites structurés qui captent l’attention grâce aux liens et à la reconnaissance par les pairs. Les blogs disposent très souvent de peu d’audience. Enfin, les musées, les pouvoirs publics, les médias nationaux ne s’approprient pas assez le sujet et le cloisonnent trop. Est-ce un bien ou un mal ? Ce sujet divise justement les acteurs de notre controverse, spécialement les artistes entre eux.