Compte-rendu de l’interview d’une source judiciaire proche du dossier - 5 juin 2009

Comment l’évolution de la jurisprudence a-t-elle influé dans la mise en examen des deux laboratoires fabriquant le vaccin contre l’hépatite B ?

GlaxoSmithKline et Sanofi Pasteur MSD avaient déjà vu leur responsabilité engagée dans plusieurs affaires concernant des cas de sclérose en plaques suite à une vaccination dès 1997. Dès cette date, des plaintes au pénal avaient été déposées, mais les laboratoires n’avaient un statut que de témoin assisté dans ces affaires. En 2007, le Conseil d’Etat a reconnu un lien de causalité entre le vaccin anti-hépatite B et la sclérose en plaques. Cela a représenté une évolution certaine. De plus, en 2008, la responsabilité des laboratoires a été reconnue par la Cour de Cassation. Ces deux tournants ont été de bons éléments d’appui pour décider de la mise en examen des laboratoires, cependant, le pénal est plus exigeant que le civil et l’administratif. Ces évolutions de jurisprudence ne peuvent donc orienter l’avenir de la mise en examen des laboratoires.

Que reproche-t-on exactement aux deux laboratoires ayant fabriqué le vaccin ?

Les responsables des deux laboratoires ont été mis en examen pour « tromperie aggravée ». Autrement dit, ils sont poursuivis pour tromperie sur les contrôles, les risques et les qualités substantielles du vaccin, ce qui a eu pour conséquence de le rendre dangereux pour la santé de la population.

Il convient par ailleurs de rappeler que le laboratoire Pasteur MSD est également mis en examen pour homicide involontaire en tant que personne morale. Il s’agit de l’affaire Desainquentin, du nom de la patiente décédée à l’âge de 28 ans en 1998 des suites d’une sclérose en plaques. Les parents s’étaient constitués partie civile. La décision sera rendue en septembre.

Quelles conclusions tirer de ces mises en examen ?

Elles montrent que les recommandations en vue de la vaccination n’étaient pas véritablement conformes aux risques véritables.

Quelle est la différence entre le pénal et le civil ?

Les affaires traitées dans le domaine pénal doivent démontrer un lien de causalité certain.

Au civil, il s’agit avant tout d’indemniser les victimes de la maladie. Cette indemnisation s’avère beaucoup plus facile car on cherche avant tout se passer du pénal, les autorités voulant à tout prix éviter les affaires de santé publique.

Il est possible d’établir un parallèle entre les victimes des hormones de croissance ou les hémophiles et les victimes du vaccin en ce qui concerne la somme dérisoire des indemnisations. Certains malades refusent d’ailleurs parfois les sommes proposées et se dirigent vers le pénal.

Votre but est-il de sensibiliser le public aux risques liés au vaccin contre l’hépatite B ?

Malgré les accusations d’être à l’origine de futurs cas d’hépatites, l’objectif premier n’est pas de rendre l’affaire publique mais d’identifier les cas de désinformations et de dissimulations. La campagne de vaccination lancée en 1994 mettait en avant le fait que le virus se transmet par la salive, ce qui n’apparaît que dans des cas extrêmement rares. Les laboratoires ont gagné énormément d’argent avec cette campagne puisqu’ils ont écoulé près de 70 millions de doses de vaccin. On est donc en droit de s’interroger sur la publicité mensongère de la part de ces laboratoires.

Mais il ne s’agit pas de communiquer sur les risques du vaccin. Ainsi Gisèle Mor, qui a défendu de nombreuses victimes de la SEP a-t-elle été assignée en justice par le laboratoire GlaxoSmithKline pour avoir, au cours de ses entretiens avec la presse, brisé le secret d’instruction. Une décision qui fut ensuite confirmée par la 9 e cour d’appel de Paris et la cour de cassation.

Peut-on donc affirmer que les enjeux économiques surpassent les intérêts de santé publique ?

En 2005, la Cour de justice de la République avait classé sans suite une plainte pour « mise en danger de la vie d’autrui » visant les ex-ministres de la Santé Jean-François Mattéi, Bernard Kouchner et Philippe Douste-Blazy.

Il s’agit bien d’un problème de santé publique car les campagnes de communication n’ont pas effectué de ciblages alors que le vaccin s’adresse avant tout à des catégories à risques. On a fait croire à la population entière qu’il était très risqué de ne pas se faire vacciner.

Par quels moyens procèdent les juges pour établir le lien de causalité ?

Les juges se fondent uniquement sur des expertises. Le problème reste que l’on ne connaît toujours pas les causes de l’apparition de la sclérose en plaques. Ainsi, en présence d’un doute, on peut faire valoir la probabilité d’un lien de causalité. C’est d’ailleurs sur les bases d’une forte probabilité de lien que la mise en examen du laboratoire Pasteur pour « homicide involontaire » a été rendue possible.

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